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Du 6 au 9 novembre, durant EquipHotel, Intramuros a co-animé des cafés-débats avec l’Ameublement français, sur leur stand baptisé Interior Design Center. Ont été abordés des sujets liés à la conception d’espaces CHR, la mutation et le développement du marché. Retrouvez le résumé des échanges du 6 novembre portant sur la réalité du pouvoir de prescription de l’architecte d’intérieur.
Autour de la sublime table en Corian conçue par Image, cinq professionnels ont partagé leurs points de vue :
- Régis Botta, Architecte DPLG, Régis Botta – Architectures
- Flore-Anne de Clermont, responsable innovation, Valdélia
- Adrien Lanotte, senior analyst, MKG Consulting
- Olivier Lekien, architecte d’intérieur, atelier OLK
- Caroline Tissier, architecte d’intérieur, Caroline Tissier Intérieurs
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L’architecte d’intérieur a-t-il toujours le pouvoir de prescription ?
Derrière ce titre un brin provocateur, la vraie question abordée était : qui est l’acheteur aujourd’hui ? Une question qui complexe quand on connaît la multiplicité d’acteurs et niveaux d’intervention nécessaires dans un projet d’hôtel aujourd’hui, mais qu’Adrien Lanotte, analyste chez MKG Consulting a souhaité illustrer en préambule des échanges. Le cabinet de conseil étant en charge d’une étude commanditée par l’Ameublement français, sur la cartographie des parcours d’achat en mobilier dans le secteur contract. L’objectif de cette étude étant de faire le pont entre les contraintes de chacun et d’identifier des facteurs clés de succès pour aboutir à une collaboration plus fructueuse.
Un premier constat partagé par tous : depuis plus de 20 ans, le nombre d’acteurs intervenant dans un projet n’a cessé d’augmenter et d’évoluer, formant un écosystème d’acteurs de plus en plus complexe à appréhender. L’étude montre qu’il n’y a pas de schéma-type, mais pour autant, les étapes de déroulement d’un projet s’organisent généralement comme suit : un investisseur lance une idée, puis sont sollicités des architectes, architectes d’intérieur/designers, des bureaux d’études pour étudier sa mise en place. Après cette deuxième étape, on passe à l’exécution : et c’est là qu’interviennent les acteurs de l’ameublement, car c’est le moment où le client va faire des appels d’offres et solliciter des propositions de la part de distributeurs et de fabricants.
La complexe gestion du budget
Une fois que le donneur d’ordre a choisi l’architecte d’intérieur, comme le note Adrien Lanotte, « ces deux acteurs vont discuter pour définir les attentes, mais sans pour autant être dans le réel des produits à ce moment-là, c’est encore une phase de dessin. » Le fabricant intervient tardivement, pour répondre aux questions de faisabilité du dessin. Sa mission sera de chiffrer le projet en prenant en compte les contraintes du porteur de projet : si celui-ci démarre avec une enveloppe très précise et qu’après
étude, les coûts sont plus élevés, il faut réussir à s’adapter sans perdre l’idée de départ.
Ainsi, aujourd’hui, pour Adrien Lanotte, « dans le secteur du contract, le rôle du fabricant est un peu celui d’un technico-commercial. C’est lui qui va pouvoir chiffrer le projet », ce qui va déterminer sa faisabilité. D’où l’intérêt d’associer davantage et le plus en amont possible le fabricant, que le choix d’aménagement soit établi sur catalogue, concerne du sur-mesure ou demande une adaptation de gamme en semi-mesure. Les fabricants français de mobilier et industriels de l’agencement précisent que les intégrer dès l’amont, au moment de la conception d’un projet, représenterait une réelle valeur ajoutée économique pour le commanditaire du projet. Le fabricant fabrique, mais il accompagne et propose des solutions aux architectes d’intérieur et designers.
Olivier Lekien, directeur de l’atelier OLK qu’il a fondé en 2019, évoque une évolution de son rôle d’architecte d’intérieur vers celui de chef d’orchestre : « Je dirais que notre métier a changé. Le nombre d’acteurs est de plus en plus important et donc en tant qu’architecte, on devient un peu créateur de synthèse. À mon échelle, j’essaye d’apporter une solution d’ensemble afin d’atteindre un équilibre. »
Parcours d’achat : mais qui achète ?
Et si la question concernant la nécessité d’intégrer les fabricants en amont semble obtenir l’unanimité, une autre importe tout autant : qui est en charge de l’achat ? Caroline Tissier, Régis Botta et Olivier Lekien l’expriment clairement : sauf exception, ils ne sont pas les acheteurs directs, mais accompagnent les clients pour trouver des terrains d’entente, comme l’explique justement Olivier Lekien : « Si j’achète moi-même, c’est que je pense qu’il y aura une plus-value pour le projet. Mais sinon, je vais généralement proposer des fabricants au client qui fera son choix. Il arrive aussi qu’il fasse appel à son propre réseau qu’il peut être intéressant d’exploiter. Encore une fois, on en revient à cette idée de synthèse à faire ensemble.»
Comment le choix est-il fait ?
Les architectes d’intérieur soulignent ce point : le respect du planning, pour que l’hôtel ouvre à temps, est crucial pour l’architecte d’intérieur. Et plus que le prix, le vrai facteur de décision est dorénavant le facteur temps : « Tout est une question de réaction au bon moment. Si le fabricant est en capacité de réagir quand c’est nécessaire, c’est là qu’il peut obtenir le marché. C’est ce délai-là qu’il faut surtout adapter » explique Olivier Lekien.
Et cette question de délais est justement au cœur de nombreux projets et dans beaucoup de cas, les fabricants français vont être mis en concurrence avec des fabricants à l’international, délai oblige. Pour autant, sur les chantiers, les fabricants locaux (les fabricants français en France) pourront mieux réagir à des questions de SAV ou d’ajustements sur place qu’un fabricant plus éloigné. Ici encore, la plus value-économique et le gain de temps réalisé sont une nouvelle fois non-négligeables.
Dans le public, un professionnel en sourcing de matériaux, dans un cabinet d’architectes spécialisé dans les projets du milieu du luxe, évoque en effet la volonté de certains clients de trouver des « équivalents » une fois que le projet est validé, dans le but de faire des économies ou atteindre les délais de livraison plus rapidement. Ces recherches sont aussi faites par des intermédiaires, qui rendent difficilement lisible la lecture du schéma de décision, d’arbitrage et de transparence du prix que coûte réellement un meuble après que chacun ait été sollicité dans la mission de l’aménagement.
L’engagement RSE : vers une évolution du marché ?
Tous l’accordent : en ce qui concerne le mobilier, il est compliqué aujourd’hui de faire des projets 100 % en circuits courts, comme l’explique justement Caroline Tissier : « J’ai pu travailler avec des chefs qui essayent de fonctionner en circuit court dans leur restaurant et c’est très bien. Pour autant, il me semble aujourd’hui compliqué de faire un hôtel qui soit totalement en circuit court, même si je vois de nettes améliorations et des solutions apportées. »
En revanche, tous les acteurs autour de la table mentionnent une prise en compte RSE de plus en plus valorisée dans la conception projets. Pour le moment, ils y répondent au moins sur le plan technique, en intégrant par exemple des systèmes d’économie d’énergie ou d’isolation. Flore-Anne de Clermont, reponsable innovation chez Valdélia, explique la démarche de cet éco-organisme, dont l’objectif est de valoriser du mobilier de réemploi au sein des projets. Valdélia fait l’intermédiaire entre les personnes qui souhaitent évacuer leur mobilier et celles qui souhaitent faire du réemploi. Une nouvelle piste d’engagement RSE, qui entre petit à petit dans la culture d’achat et de conception du projet.
Les adaptations des professionnels au marché
Après un parcours en partie chez Ligne Roset puis en agence spécialisée dans l’hôtellerie, Caroline Tessier a ouvert sa propre agence d’architecture d’intérieur en 2013. Elle travaille de façon rapprochée avec les fabricants sur ses projets, et parallèlement, elle s’est associée à Contract Factory, agencé créée par Alexis Marechal, qui accompagne le client sur l’ensemble du parcours : « Quel que soit le projet, le parcours sera le même. Le fait de connaître tous les fabricants nous permet d’avoir une vision large et donc de savoir avec lesquels il faut travailler au moment d’élaborer un projet » explique-t-elle. Elle propose un parcours tout tracé et résout ainsi la question de la gestion des achats et des intermédiaires.
Régis Botta a créé son agence en 2011, avec cette spécificité qu’elle comporte une section design. Ses projets comprennent majoritairement du mobilier fait sur mesure, et il intègre dès la phase de conception les artisans et les fabricants.« Tout ce qui concerne le mobilier et le prototypage est l’un des premiers dossiers à gérer. C’est l’un des plus importants à discuter en amont. Donc intégrer les fabricants dès le début, c’est une évidence pour moi. » Le sur mesure implique cependant que les pièces ne pourront pas être développées à plus grande échelle, justement pour respecter la demande première du client qui était d’avoir un mobilier unique. « En général en mobilier sur mesure, le client finance le prototypage et donc il ne veut pas voir ses pièces développées ailleurs. La seule exception est lors de développement de franchises ou de chartes par exemple. Dans ce cas, cela devient intéressant pour un fabricant puisqu’il y aura des commandes en grande quantité » continue Régis Botta. Il propose également des modèles en semi-mesure en adaptant notamment pour une franchise un modèle standard qu’il développe pour qu’il devienne propre au client.
Parmi les autres pistes évoquées. Adrien Lanotte a proposé l’idée, pour le fabricant, de développer une économie servicielle qui consisterait à sortir du cycle d’achat produit pour proposer des produits de remplacement ou de faire un recours à un système de leasing afin d’éviter par exemple d’avoir à immobiliser une chambre en cas de problème liés à de délais de fabrication ou de livraison justement. Régis Botta revient sur la nécessité de construire une proximité avec les fabricants. En effet, une fois qu’une première collaboration est faite, une proximité se créer et permet donc d’avoir une meilleure connaissance des outils de production des fabricants. De fait, il sera plus simple de comprendre les adaptations possibles et cela aidera logiquement à gagner du temps par la suite.
Faire simple, il n’y a pas plus compliqué. Adrien Messié en sait quelque chose. Toute sa carrière de designer, depuis la direction des licences et des partenariats au Studio Andrée Putman à la création de mobilier, en passant par la DA de Le Gramme, qu’il a cofondé, sans oublier les événements qu’il éditorialise via l’agence H A ï K U, a été jusqu’ici vouée à la recherche de cette nue perfection.
L’univers d’Adrien Messié peut tour à tour être délicat et sensible, rigoureux et précis ou alors très électrisant. Dans un dédale de courbes, de lignes, de séquences, de fractales et de tangentes qu’il manie à l’échelle nano, pour ses bijoux masculins ou en format XXL, pour son projet Villers (une table de plusieurs centaines de kilos en pierre de lave et terre cuite imprimée en 3D destinée à accueillir jusqu’à 14 convives), son monde intérieur recèle plein de surprises. On ne le voit pas forcément, mais ce que l’on devine à travers le fruit de ses recherches, c’est qu’Adrien Messié est très sensible à la magie des chiffres. Qu’il vibre face aux forces de la nature qui dans un parfait ordre cosmique donnent un sens au beau, une cohérence. « Une évidence » préfère-t-il dire.
Proximité créative
Formé aux industries créatives et à l’univers du luxe, Adrien Messié commence son parcours créatif auprès d’un très grand nom du design, Andrée Putman. Il intègre son agence en 2004. Il aime à dire qu’il y a « infusé »… autant qu’il s’y est enrichi en bénéficiant de la proximité de (futurs) créatifs de renom « tant l’agence était un véritable incubateur » tient-il à souligner. Élise Fouin, Rodolphe Parente, Antoine Simonin, Bertrand Thibouville Nicolas Dorval Bory ou encore Maximilien Jencquel ont été ses collègues. De stagiaire, il termine directeur des Éditions et Licences. Il y développe des collaborations avec les plus grandes marques et éditeurs internationaux avec en autres des collections avec Christofle, Emeco, Nespresso, La Forge de Laguiole ou encore Fermob.
Émotion
Son tropisme naturel vers les mathématiques n’est pas encore révélé quand il imagine le concept Le Gramme en 2012. Et pourtant. Ce projet, dont la raison est la création d’objets portés ou fonctionnels déclinés des formes élémentaires en métaux précieux – or 750 ou argent 925 – et nommés par leur poids en grammes, semble sortir d’un cerveau de scientifique.
Quand il raconte sa genèse, on entre dans le registre de l’émotion. « Ma sœur m’avait ramené de voyage un petit ruban en argent ultra simple, pur et sans fioritures. Je lui ai cherché en vain des « frères » afin de le porter « en fratrie » à mon poignet, comme une sorte de monade. Je me suis résolu à le faire faire en France chez un petit artisan dont le discours s’apparentait à celui d’un alchimiste… Au moment de payer les trois prototypes, le faiseur m’explique qu’il y a deux coûts à additionner : le temps de façon d’un côté et de l’autre le poids de la matière “utile” pour la confection de chaque pièce » se souvient-il. Pour plus de facilité, chaque prototype est nommé en fonction de son poids en gramme. 7, 15 et 21, puis 33 et 41 sont les petits noms des 5 premiers bijoux et Grammes leur nom de famille. Bientôt ce sera Le Gramme.
Fondamentaux utiles
Les prototypes au poignet, le nom en tête, Adrien Messié est rejoint par Erwan Le Louër. Celui qui avait créé la marque de joaillerie éthique Jem (et est devenu le directeur artistique de Le Gramme depuis le retrait des opérations d’Adrien Messié en 2019), lui permet de « synthétiser les fondamentaux utiles » et « cofonder une marque aboutie en 4 mois ». Pendant 7 ans, Adrien Messié dirige l’ensemble de la création, du produit jusqu’à l’univers de présentation. De Dover Street Market à Londres à Colette, le temple de la fashion hype à Paris jusqu’à sa fermeture en 2017, tous les points de vente les plus prestigieux, en mal de marques de bijoux modernes, contemporains et design référencent les collections Le Gramme.
Événementiel
Parallèlement, il cofonde en 2013 avec son ami et associé Nadir Sayah, l’agence H A ï K U. Elle intervient en Direction Artistique globale pour des clubs. Comme toujours avec Adrien Messié, même quand il s’agit de moments et d’endroits pour lâcher prise, tout est carré, rigoureux… mathématique. Inauguré en septembre dernier, leur dernier gros chantier en date concerne le club techno underground Carbone.
L’agence produit mensuellement des soirées éponymes de musique électronique H A ï K U, en invitant des artistes et DJ, au rayonnement international tels que Dixon, Jennifer Cardini, Bedouin, Âme, Adriatique, &Me, Adam Port, Rampa… « Nous collaborons régulièrement avec les labels référents du secteur musical comme Keinmusik en produisant leurs propres évènements. Le dernier en date, « Lost In A Moment » (concept du label allemand Innervisions) a eu lieu le 10 juillet dernier, en journée, sur le Domaine national de Saint-Germain-en-Laye avec 4000 personnes et vue sur tout Paris ».
Nombre d’or
Enfin, dans sa dernière création pour Théorème Editions, depuis mars 2022, la poésie mathématique d’Adrien Messié saute aux yeux. Pour cette maison d’édition française créée par David Giroire et Jérôme Bazzocchi, il utilise la céramique émaillée craquelée et le bois laqué, et s’inspire de la courbe de Fibonacci, cette séquence de chiffres liée au nombre d’or, qu’il décline en deux premières fonctions : une table à manger sur 3 pieds ainsi qu’un petit meuble versatile ; un tabouret / petit bout de canapé. De nouvelles couleurs et finitions sortent régulièrement, d’autres déclinaisons sont prévues pour 2023 et le prix, inférieur à 800 euros, rend accessible une table en céramique made in France.
Cette gamme Fibonacci est une dérivée du projet Villers. Réalisée en commande spéciale et sur mesure pour un couple de particuliers en Normandie en 2021, la table conviviale (260 x 160 cm) devait avoir une forme qui permette d’accueillir de grandes tablées « mais aussi des tête-à-tête sans être éloignés ». En forme de médiator pour les profanes mais selon la courbe de Fibonacci pour les esthètes, le plateau est en pierre de lave de Volvic (caractérisée par ses pores très serrés). Les ondes visibles en surface montre le « temps » qu’il a fallu à la nature pour créer cette matière agréable au toucher. Maxence De Bagneux, artiste pluridisciplinaire et artisan céramiste, a réalisé le piètement. Ces 2 pieds XXL en grès rouge chamotté (qui font écho à la structure en brique rouge de la maison – ancien lavoir) imprimé en 3D, reprennent cette même courbe mais « extrudée », divisés puis éloignés pour obtenir la stabilité nécessaire. L’ensemble a été imprimé et cuit au Pôle Céramique Normandie. « Ce fut une vraie aventure au regard du temps de séchage des pièces avant cuisson, de la nécessité de trouver un four d’une grande capacité, et des nombreuses manipulations », indique Adrien Messié, pas peu fier d’avoir participer à une grande première.
La suite de Fibonacci ? Des marques de bijoux pourraient-elles réveiller l’envie d’Adrien de se plonger dans la création d’objets à porter tout contre soi ? Des marques de mobilier auraient-elles besoin d’un œil neuf et mathématique pour repenser le confort moderne ? En tout cas, une maison d’édition portugaise est sur le point de se lancer, début 2023, avec un objet art déco désigné par Adrien Messié.
Art déco en France et Art déco outre-Atlantique, deux appellations pour un style moderniste s’efforçant de mettre de l’art dans tout. La Cité de l’architecture remet à l’honneur ce style, espérant toujours sa reconnaissance officielle.
« L’Art déco est méprisé », déplore Emmanuel Bréon, commissaire de l’exposition « Art déco, France-Amérique du Nord », actuellement présentée à la Cité de l’architecture. Pas une œuvre Art déco au MoMA (musée d’Art moderne de New York), ni dans les collections des grands musées français. Quant au quasi homonyme musée des Arts décoratifs, il couvre un spectre bien plus large dans les arts appliqués. Rayon de soleil dans ce paysage désolé, les beaux succès en salles des ventes d’un Jacques-Émile Ruhlmann ou d’un Pierre Chareau, et une curiosité du grand public pour le genre, avec des parcours urbains à Saint-Quentin, Roubaix, Lens, Clichy, et ailleurs, sans parler des Art Deco Societies, qui pullulent outre-Atlantique.
Comme l’Art nouveau, péjorativement appelé « art nouille » jusqu’à sa réhabilitation par le musée d’Orsay, l’Art déco va-t-il recevoir sa consécration officielle et sortir du purgatoire critique où il moisit depuis tant d’années ? Retracer la généalogie de ce mouvement n’est pas aisé, et en appuyant d’emblée sur le lien entre Amérique du Nord (Canada, États-Unis et Mexique compris) avant de définir ledit Art déco, l’exposition ne contribue pas à clarifier la situation. Pour une fois, l’Art déco ne serait pas une nouveauté d’Amérique, à l’instar des hôtels ou des gratte-ciel. Né en Europe, il aurait franchi l’Atlantique avec les soldats américains démobilisés, étudiant dans des écoles spécialisées de Fontainebleau ou de Meudon en attendant leur retour au pays. Mais apprenaient-ils les ressorts d’un nouveau style moderne ou testaient-ils un avatar de l’enseignement de l’École des beaux-arts, alors à son apogée ? Mouvement sans manifeste, ni véritable chef de file, l’Art déco n’aurait, selon certains auteurs, reçu son nom qu’en 1966, à l’occasion d’une exposition au musée des Arts décoratifs. L’exposition de 1925, moment majeur pour les arts publics en France, passe aussi pour sa date de naissance. Brièvement abordé, car déjà objet d’une exposition dans les mêmes murs en 2013, la manifestation ne faisait que cristalliser des pratiques apparues à l’aube du XXe siècle. Le temps de l’Art déco semble courir des années 1900 jusqu’à la veille de la Première Guerre mondiale, avec une diffusion internationale, notamment outre-Atlantique, au centre de l’exposition.
L’art universel
L’aspect encore aujourd’hui le plus captivant de l’Art déco tient à cette volonté d’inventer une forme artistique applicable à tous les arts, purs ou appliqués, de l’architecture à la peinture, en passant par le textile, le mobilier, la sculpture ou le cinéma. Il apparaît comme la dernière incarnation de l’œuvre d’art totale, suivant un principe né en Allemagne au XIXe siècle avec le théâtre wagnérien appliquant la création à toutes les échelles. L’Art déco s’attache au lien entre art, artisanat et économie, autre principe germanique qui aboutira à la création du Bauhaus, mais pas plus en France qu’aux États-Unis il n’aura d’école aussi emblématique. Le soutien de l’État français à l’art décoratif, perçu comme un élément d’excellence de l’économie nationale, est perceptible dans l’exposition de 1925, puis l’Exposition universelle de Paris en 1937. Exposition permanente, les grands paquebots servent autant au transport de voyageurs que de vitrines des savoir-faire français. Une cimaise présente la coupe l’une de ces villes flottantes qui fascineront bien des architectes, et donne un aperçu des décors des salles à manger de l’« Île-de-France » (1927) ou de son rival plus prestigieux, le « Normandie » (1935). Le passager traverse l’Atlantique dans une œuvre d’art flottante et praticable, un décor travaillé jusqu’à l’excès par Ruhlmann, Louis Süe et André Mare, le sculpteur Alfred Janniot et le peintre Jean Dupas, pour n’en citer que quelques-uns. « Le plus beau seau à champagne du monde », aurait dit la presse de l’époque en parlant de l’« Île-de-France ».
Sur la terre ou sur les mers, l’Art déco est d’abord l’art de la haute bourgeoisie. Il se développe dans les hôtels particuliers. Il élabore son vocabulaire en toute liberté dans ces univers privés où s’inventent de nouvelles façons de travailler le verre ou le fer, où l’on choisit les motifs et où l’on travaille leur stylisation. Aucune surprise, donc, que l’Art déco se retrouve sur les enseignes des grands magasins de luxe new-yorkais quand il traverse l’Atlantique. Ce langage de l’élite se démocratise après la crise de 1929, pour gagner l’habitat populaire et le mobilier. La corbeille de fruits stylisée va triompher sur les garde-corps, les frontons et les colonnes, éclipsant la vieillotte et compliquée feuille d’acanthe des chapiteaux corinthiens. L’Art déco offre à un monde en crise la possibilité d’avoir un ornement moderne, économique et passe-partout.
Streamline, ou les origines Art déco du design
Les peintures du Mexicain Angel Zárraga comptent parmi les belles découvertes de l’exposition. Son installation en France dès 1904 n’en fait pas le sujet le plus représentatif de l’Art déco du Nouveau Monde. Après les grands magasins et l’univers du luxe, la diffusion du mouvement et sa popularisation outre-Atlantique s’opèrent grâce aux objets accompagnant l’essor de la consommation de masse épousant le style « streamline », lui aussi méprisé des musées et des critiques. Inventé par des figures comme Donald Deskey, Walter Dorwin Teague ou Raymond Loewy, prototypes du designer industriel, le style s’identifie à trois « traits de vitesse » qui seraient empruntés à la bande dessinée. Ils impriment une idée de mouvement à des objets qui n’en ont aucunement besoin, tant qu’ils ne sont pas utilisés comme projectiles : taille-crayon, lampe, radiateur… Les études aérodynamiques développées dans l’aéronautique, appliquées aux locomotives et aux automobiles, expliquent aussi la genèse de ces formes, et les traits figurent l’écoulement d’air visualisé en soufflerie. Le développement de matériaux artificiels, tels que le Lloyd Loom, ersatz du rotin utilisé pour la fabrication de meubles dans les zeppelins et les transports aériens naissants, annonce l’apparition de contraintes de légèreté et l’arrivée de nouveaux matériaux synthétiques qui changeront peu à peu la donne en matière de design.
L’architecture absente
Si les nombreuses sculptures et les peintures de l’exposition raviront le visiteur, suffiront-elles à le consoler de voir aussi peu d’architecture dans les murs d’une institution qui y est dédiée ? Où sont les polémiques déclenchées par ce style ? Elles étaient pourtant animées, en témoigne l’ouvrage « L’Art décoratif d’aujourd’hui », publié par Le Corbusier en 1925. Une condamnation sans appel d’un Art déco qu’il juge superflu. « L’art décoratif moderne n’a pas de décor », disait l’architecte. Où sont les Faure-Dujarric, Henri Zipcy, Henry Trésal, ou, aux États-Unis, les Arthur Peabody, Ralph Walker, Van Alen ? Où sont les immeubles d’habitation, les grands magasins, les pavillons de l’Exposition de 1925, l’ambassade du Mexique, dévoilée en avant-première lors de l’exposition puis oubliée ? L’architecture se borne à trois exemples intéressants, mais souvent périphériques ou déjà très connus, à l’instar du palais de Chaillot, qualifié de washingtonien, et à la figure de Jacques Carlu, architecte américanophile installé un temps aux États-Unis. Pas de quoi comprendre les débats, ni restituer la richesse de ce patrimoine oublié, et de ce fait toujours menacé. Signe que, plus encore que l’Art déco, l’architecture peine à accéder à la considération critique ?
Derrière ses allures de showroom de technologie deux-roues hi-tech et ludique, l’exposition « Bicyclette(s), Faire Des Vélos » commissionnée à la Cité du Design de Saint-Étienne par le designer Jean-Louis Fréchin, redessine le paysage innovant d’une industrie française et européenne du vélo en plein boom. Une vision stratégique dans laquelle le design s’est clairement emparé du maillot jaune.
À Saint-Étienne, le vélo est une histoire ancienne. C’est là que le premier vélo français est né en 1886 et que sa première version populaire (le modèle Hirondelle) voit le jour cinq ans plus tard, lançant le sprint pour de très nombreuses entreprises (Mercier, Mécacycle, Vitus, etc.) qui fleuriront dans les décennies suivantes. Aujourd’hui, ce fleuron de l’industrie locale a quasiment disparu (à l’exception de la réputée entreprise de jantes Mach 1 encore située dans les environs). Pour autant, le vélo n’a pas dit son dernier mot dans la Préfecture de la Loire, et l’exposition « Bicyclette(s), Faire Des Vélos » commissionnée à la Cité du Design de Saint-Étienne par le designer Jean-Louis Fréchin de l’agence NoDesign, où se retrouve quelques dizaines d’exposants, rappelle opportunément que le vélo est aujourd’hui l’élément central des nouvelles mobilités et un fantastique produit fonctionnel et stimulant pour les nouveaux usages. Mais, par-delà ce principe (presque) unanimement établi par nos besoins de nouvelles circulations douces, c’est à la découverte du « paysage du renouveau d’une industrie » française et européenne que nous invite d’abord Jean-Louis Fréchin.
Comme il nous le rappelle, « l’avenir du vélo passe par le design », que cela soit à travers la technologie et la définition des nouveaux usages, mais aussi derrière ce besoin « qu’il faut aussi des gens pour construire des vélos » ici en Europe. Et ces gens justement sont bien là, qu’ils soient entrepreneurs, start-ups, ingénieurs, et surtout designers, tissant le lien nécessaire entre la créativité de l’atelier artisanal et les nécessités industrielles qui s’imposent. « « Bicyclette(s), Faire Des Vélos » est moins une exposition de bicyclettes que la démonstration du savoir-faire de gens passionnés, d’agences, de designers qui permettent d’avoir accès à des objets de culture, au même titre qu’un livre ou un film », explique Jean-Louis Fréchin en précisant que « les objets disent souvent qui nous sommes, mais qu’avant de penser leurs usages, il faut savoir les produire ».
Un paysage industriel en forme de topologie de machines
Ces objets, ces vélos en l’occurrence, emplissent le premier espace d’exposition selon une véritable topologie de machines, derrière laquelle la main de l’homme et du designer n’est jamais très loin. Il y a des vélos « taffeurs », pour aller quotidiennement au travail, comme les références en vélos à assistance électriques Moustache Bikes ou ce modèle de l’autre marque française qui monte, Iweech, qui associe algorithmes et machine learning pour calculer sa vitesse et potence escamotable pour le rangement. Il y a des vélos « transporteurs long tail » ou des bicyclettes pensées pour le voyage, comme les modèles des cycles Victoire – structure qui se trouve derrière Le Syndicat des Artisans du Cycle, ou encore le modèle PechTregon, designé par Matthieu Chollet ancien de l’ENSCI comme Jean-Louis Fréchin. Il y a aussi dans la deuxième salle labellisée « atelier », les représentants des fabricants de composants : boyaux FMB, jantes Mavic, boîte de vitesse automatisée Cavalerie ou batterie réparable Gouach, pour n’en citer que quelques-uns, tous partie prenante de cette économie créative pour qui la roue semble à nouveau tourner. Un modèle électrique spécial, le cycle Batspad, en acier durable, a même été spécialement conçu par Jean-Louis Fréchin à partir de multiples composants parmi ceux exposés.
C’est d’ailleurs cet esprit d’ingénierie innovante, dans lequel la patte des designers est prépondérante, qui retient le plus l’attention. La marque portugaise Autorq (le Portugal est le premier producteur européen de vélos et dispose donc de l’écosystème économique et technique le mieux fourni du continent) a ainsi développé un boîtier de pédalier mesurant avec précision la force du décalage pour l’adapter à la conduite la plus naturelle. Le prototype Cocotte de H3Bike entend simplifier l’usage de la bicyclette avec sa boite de vitesse robotisée.
La forme procède directement de ces avancées où les passerelles avec l’industrie automobile sont patentes, comme on le constate avec les produits du groupe Rebirth qui propose un vélo électrique Matra, directement inspiré des principes d’utilisation de fibres de carbone recyclées et recyclables de la maison-mère automobile, permettant par exemple de travailler la partie creuse du cadre pour tout le câblage. Idem Pour le modèle Multipath d’Ultima Mobility dont le cadre monocoque en plastique est complété de carbone injecté comme dans les dernières innovations pour voitures. Les choix de matières sont d’ailleurs essentiels là aussi, avec par exemple le cadre en bambou, matériau naturel et renouvelable, développé par l’entreprise lyonnaise Cyclik, déclinable dans des versions étonnement « luxe », comme ce vélo Hermès conçu par le designer Antoine Fritsch.
Le vélo perd son genre
De fait, la réflexion très globale, industrielle et designée, qui sous-tend « Bicyclette(s), Faire Des Vélos » se nourrit de multiples points d’entrée. Et le moins crucial n’est sans doute pas cette réflexion particulièrement portée par Jean-Louis Fréchin autour d’un changement de paradigme de genre dans l’usage du vélo. Il rappelle ainsi combien « les pistes cyclables dans les grandes villes deviennent des lieux de mixité » offrant entre autres « les refus de la promiscuité dans les transports et un sentiment de sécurité. » Surtout, il note que l’industrie du prêt à rouler, qui avait ajusté la bicyclette aux mensurations masculines, change son fusil d’épaule avec la création de toutes ces marques et gammes spécifiques. « Aujourd’hui, les hommes ont adopté les cadres à vélo ouvert en V [comme ceux présentés dans l’exposition par les modèles de la marque belge Cowboy] », souligne-t-il, tout en reconnaissant « qu’il reste à accompagner la montée en nombre d’une pratique de mobilité populaire et commune qui ne doit pas être réservée qu’aux femmes et aux hommes jeunes et en bonne santé grâce à des infrastructures adaptées et sûres. » Un nouveau défi dans lequel le design peut sans doute apporter aussi sa pierre à l’édifice, dans des considérations de design d’intérêt général notamment.
Le restaurant Ardent a ouvert à Paris dans le quartier du Faubourg-Montmartre en septembre après quatre mois de travaux. Mené par l’agence d’architecture DOD dirigée par David-Olivier Descombes, Ardent est un projet qui joue avec les contrastes, en jonglant avec un aspect plus brut, à l’image de la cuisine proposée à la carte.
Depuis sa création en 2009, l’agence d’architecture DOD mène des projets à la fois pour le résidentiel et le contract. Son fondateur, David-Olivier Descombes, formé à l’École Supérieure d’Architecture Intérieure de Lyon et à l’Ecole Nationale Supérieure d’Architecture de Versailles, aime travailler les espaces pour en créer des lieux uniques, qui ressemblent le plus possible à ses clients. « Je veux faire des projets qui soient ceux des clients, pas les miens. C’est quelque chose de très important pour moi » confie David-Olivier Descombes. Avec Ardent, le défi qui lui a été lancé avec son équipe a été de réhabiliter un ancien restaurant de cuisine asiatique en un lieu à la fois simpliste mais avec tout de même une touche atypique.
Un équilibre dans les contrastes
Avec une cuisine dite « brute », en raison de la cuisson au feu de bois de ses plats de l’entrée au dessert, le restaurant Ardent est le résultat d’un travail sur les contrastes et les espaces de partage. « Plus il y a de contraste et plus on arrive à transmettre de choses selon moi » explique l’architecte d’intérieur. Ainsi, là où l’espace bar et cuisine se fondent dans des murs et du mobilier noir, le reste de la salle s’appuie sur des tons plus clairs, accentués par la lumière naturelle produites par les baies vitrées qui entourent le restaurant, offrant ainsi un contraste intéressant. Les tables, les chaises et les banquettes s’habillent de tons clairs avec l’utilisation de cuir et de bois. Quant aux murs, ils sont ornés de miroirs aux allures vintages tandis que des carreaux de carrelage blancs tapissent l’espace salle à manger.
À travers l’utilisation de matériaux tels que du bois brûlé pour l’espace cuisine, du cuir naturel pour les banquettes, du bois pour les tables et chaises ou encore du carrelage pour les murs, l’agence DOD offre aux clients un jeu et une harmonie des matières, pour un résultat tout en sobriété. « Je ne voulais pas être dans la sophistication. Nous avions un point de départ : le côté brute de la cuisine, il a donc fallu jouer avec les matières pour proposer un aspect plus doux au reste de l’espace, pour arriver à un équilibre » conclu-t-il.
S’appuyer sur les NFT pour protéger les designers, c’est l’idée que souhaite développer et démocratiser Claire Germouty, créatrice de Maison Papier. Fondée début 2022, cette maison d’édition 3.0 travaille main dans la main avec le fabricant Procédés Chénel et l’agence Minting.fr, pour proposer des objets papier responsables, et déclinés dans le métavers.
L’aventure Maison Papier commence par la découverte de Circea, une lampe nid d’abeille designée par Luc de Banville. Fascinée par ses formes souples modulables à l’envi, Claire Germouty décide d’accompagner ce prototype dans un projet d’édition. Très vite, elle rencontre son fabricant, Procédés Chénel, leader des architectures de papier en Europe, qui va jouer un rôle-clé dans la naissance du projet. « Sans Sophie Chénel, il n’y a pas de Maison Papier » souligne l’éditrice avec humilité. À noter que la lampe Circea est aujourd’hui réalisée à partir de chutes de Drop Paper Honeycomb, un papier non-feu et luminescent, recyclé dans le respect des engagements de Procédés Chénel.
Un projet en faveur de la protection des designers
En lançant Maison Papier, Claire Germouty veut faire bouger les lignes. Dans la logique de son parcours – juriste, puis éditrice de livres – elle se focalise sur la protection des designers, tant au niveau des dépôts de modèles que des droits d’auteur. « J’imaginais que les revenus des designers s’alignaient sur ceux des romanciers. On en est loin ! Côté livres, les redevances tournent autour de 10 %, alors que les droits d’auteur dans le design plafonnent à 5 % en moyenne. Le plus étonnant ? Quand les ventes des objets s’envolent, les redevances s’enfoncent. Maison Papier est une « société à mission » au sens de la loi PACTE, et nous avons pris le parti d’aligner tous les droits d’auteur à 10% minimum, grâce aux revenus des NFT. » Ces aspects juridique et social sont au cœur de sa stratégie d’entreprise, à part égale avec la responsabilité environnementale.
Et c’est cet engagement autour de la protection des designers qui a convaincu Sophie Chénel, qui veille depuis toujours à accompagner et soutenir les créateurs, en leur offrant des événements crées sur mesure, de la visibilité et un lieu de résidence unique dans ses ateliers de Vanves, en périphérie de Paris. « Lancer une maison d’édition est un projet fou, mais quand les étoiles s’alignent, il faut foncer en évitant de se poser trop de questions » confie Claire Germouty.
Un NFT pour mieux protéger ?
Pour accompagner les créations des designers au sein de sa maison d’édition, Claire Germouty s’appuie sur une utilisation particulière des NFT : « Au-delà du beau, on sait que le design est d’abord là pour donner du sens à un objet, et faire rayonner le bon. Or, le NFT est un outil très efficace pour protéger les designers et projeter leurs créations vers demain. » Dans cette optique, Maison Papier a choisi de travailler avec Minting.fr, la première agence française du Web 3, qui défend un modèle français pérenne, une blockchain frugale et un achat intuitif des NFT. « Moi qui redoutais les complications techniques, je suis fière de pouvoir proposer un NFT, jumeau 3D de Circea, édité sous la forme d’un document imprimé, et vendu avec la lampe papier de Luc de Banville. »
Qui plus est, le certificat numérique lié au NFT constitue une potentielle source de revenus à long terme. « Même si le métavers est encore embryonnaire, il est acquis que les NFT garantissent l’authenticité, l’origine et la propriété d’un objet dématérialisé. Mais l’avancée majeure va résider dans le droit de suite : à chaque fois que l’un de ses NFT sera revendu, le designer pourra percevoir de nouveaux droits d’auteur. Une particularité qui pourrait changer tout le modèle économique du design et donner des ailes aux créateurs ! » souligne l’éditrice. Claire Germouty a donc proposé aux designers d’associer un NFT à chaque objet édité par sa maison. C’est ainsi que pour la première fois, un luminaire sera vendu en euros et en boutique avec son jumeau numérique, prêt à basculer dans le métavers. « La lampe Circea+NFT entre dans l’Histoire du design par une petite porte, dont on sait déjàqu’elle s’ouvre en grand vers le monde de demain ! » explique-t-elle.
Paris Design Week 2022 : un premier tremplin
Si la commercialisation de la lampe Circea + NFT de Luc de Banville est prévue pour fin 2022, Maison Papier édite également d’autres créations, parmi lesquelles Allegria. Ce dispositif lumineux, signé Sandra Biaggi et distingué par la Factory lors de la dernière édition de la Paris Design Week en septembre, reprend le principe de l’éventail. Avec ses trois mètres d’envergure, ses cellules de papier luminescent assemblées à la main et son éclairage puissant et modulable, Allegria est en passe de séduire les galeries et les professionnels en quête de dispositifs scénographiques sobres, pérennes, spectaculaires et légers.
Autre co-édition Maison Papier/Procédés Chénel présentée à la Factory : les chaises Vanves de Grégoire Borach, pensées pour mettre en valeur les qualités du Drop Cake. Ce matériau innovant et upcyclé lancé par Sophie Chénel, est fabriqué à partir de chutes de Drop Paper, déchiquetées, et compressées avec du polyéthylène. L’enjeu ? Inventer une matière dernière qualitative à partir de chutes difficilement recyclables.
Concernant la suite de ses projets, Maison Papier participera au salon Maison & Objet en janvier 2023 pour présenter la série de lampes ARA, toutes en origami de papiers fluos et de verre soufflé, signées par le designer new-yorkais Rodolfo Agrella. Le rendez-vous est donné !
Reportée en 2022 pour cause de pandémie, la 16ème édition de la Biennale de Lyon intitulée « Manifesto of Fragility » analyse l’état de fragilité face aux soubresauts du monde. Comment ? En faisant dialoguer l’histoire avec le présent, dans un axe local et international, à travers une kyrielle d’expositions dans des lieux emblématiques lyonnais, pour certains inédits.
Répartis sur quatre parcours et douze sites – dont les Usines Fagor, le macLYON, le musée Guimet ou encore le musée d’Histoire de Lyon-Gadagne -, 202 artistes de 40 pays proposent de nombreuses pièces, dont 66 ont été spécialement été réalisées pour l’occasion. « Nous souhaitions ancrer le projet dans la ville, expliquent les commissaires Sam Bardaouil et Till Fellrath, directeurs de la Hamburger Bahnhof de Berlin, à travers des histoires reliant les artistes sur le thème de la fragilité. » Deux ans et demi de recherches, effectuées avant et durant la pandémie, leur ont permis de souligner cette thématique dans ce qu’elle a de plus universel, en ces temps incertains. Avec l’exposition générale « Un monde d’une promesse infinie », ce duo primé à la dernière Biennale de Venise souhaitait revendiquer la vulnérabilité comme outil de résistance contre les exclusions, les précarités, induisant les notions de migration, de résilience et d’écologie. Parmi toutes les œuvres couvrant une multitude de supports – tapisseries, peintures, installations, vidéos, sculptures, architectures, céramiques – en voici quelques-unes marquantes.
À Fagor, la fragilité dans tous ses états
Pedro Gómez-Egaña revisite l’espace de notre quotidien
Virgo, œuvre du Colombien Pedro Gómez-Egaña intrigue. Animé par plusieurs performers, cet habitat qui semble découpé en tranches par un dispositif mobile de structures métalliques blanches, crée d’étonnantes illusions d’optique. Une œuvre, entre architecture et design, interrogeant la typologie des espaces domestiques et leur évolution, tout en en soulignant l’état de fragilité permanente.
Avec Erin M. Riley, la tapisserie casse les codes
En scénographiant sa condition de jeune femme, qu’elle conjugue à des coupures de presse, des selfies ou images glanées sur internet, la créatrice américaine trentenaire réalise des tapisseries contemporaines, respectant à la lettre cet art traditionnel. Abordant les contraintes de la condition féminine, Cramson Lanslide présente un gros plan sur une culotte rougie par les menstruations, tandis que Why Now ? montre la créatrice brûlant sa propre photographie. Des pièces textiles qui questionnent par leur radicalité, leur message et leur esthétique photographique.
Nicolas Daubanes appelle à résister
En reproduisant l’intérieur d’une salle d’audience du tribunal des forces armées de Lyon, où des portraits de condamnés réalisés à la limaille de fer sont exposés, le plasticien français évoque la fragilité dans son aspect le plus pugnace. Je ne reconnais pas la compétence de votre tribunal ! monumentale installation spécialement créée pour l’occasion, invite le public à réfléchir sur la réelle compétence de cette juridiction, sous le prisme d’une enquête policière.
Jose Dàvila, le meuble borderline
Le Mexicain déjoue les notions habituelles de stabilité en mettant des meubles chinés à Lyon, en situation d’équilibre précaire. La science comme réalité reste platonicienne est une commande en béton, bois, rocher et sangle à cliquet. Arrimé à une pierre par une sangle, le meuble tenant en équilibre sur une pièce en béton, peut vaciller à tout moment et se fracasser sur le sol. Une œuvre très visuelle, sondant la faiblesse d’un état, métaphore de la vulnérabilité de notre existence.
Le camping fantôme d’Hans Op de Beeck
Dans le Hall 4 des usines Fagor, We were the last to stay de l’artiste belge Hans Op de Beeck expose un espace public, comme après une déflagration nucléaire. Un espace urbain recouvert de cendres, silencieux et sans vie, qui alarme sur les conséquences environnementales.
Au musée d’Histoire de Lyon-Gadagne, la poésie sensible du thème dans les mains de Sara Brahim
Le cyanotype sur coton Who we are out of the Dark de la jeune Saoudienne Sara Brahim présente une élégante chorégraphie de ses propres mains sur un tissu d’un bleu profond. Délicate évocation de la vie éphémère…
Au macLYON, Louise Brunet, figure multiple de la rébellion
À travers la narration de la vie de Louise Brunet, jeune tisserande lyonnaise ayant participé à la révolte des canuts, le troisième étage du macLyon analyse la notion d’insoumission, de résilience et de lutte contre les discriminations. La bouleversante vidéo Prélude d’une mort annoncée, de Rafael França évoque les ravages du sida, dans un ballet résistant de corps s’entrelaçant, où apparaissent les noms de personnes décédées de ce fléau. Plus loin, une installation vidéo du fantastique duo libanais Joana Hadjithomas & Khalil Joreige, composée de douze films vidéo issus de caméras de surveillance du Musée Sursock à Beyrouth, transporte avec effroi le spectateur au cœur de l’explosion libanaise du 4 août 2020.
À Guimet, la nature reprend ses droits avec Ugo Schiavi
Dans la plus grande salle de cet ancien musée d’histoire naturelle, créé au XIXème siècle et tombé en désuétude depuis 2007, Grafted memory System du plasticien français Ugo Schiavi souligne la vulnérabilité de nos vies, face à la supériorité de la nature. Cet étonnant écosystème de fossiles, ossements, déchets, imbriqué d’images 3D, de fragments d’architecture du musée, constitue une vanité d’un monde nouveau, renaissant après une catastrophe.
Virginie Chuimer-Layen
16ème Biennale d’art contemporain de Lyon, « Manifesto of Fragility », Usines Fagor, macLYON, musée Guimet, musée d’histoire de Lyon-Gadagne, autres lieux à voir sur : www.biennaledelyon.com. Jusqu’au 31 décembre 2022.
Jusqu’au 26 novembre, c’est dans une galerie d’Andreas Murkudis dans le sud ouest de Berlin, que valerie_objects prends place pour exposer ses pièces iconiques et dernières nouveautés, dont la collection Silent du studio BIG-GAME.
Fondée en 2015 à Anvers en Belgique par Axel Van Den Bossche et Veerle Wenes, valerie_objects propose aux designers avec qui elle collabore de donner vie à leurs idée et leurs envies. À Berlin, la marque expose pendant un mois plusieurs pièces de ses collections iconiques. Parmi celles présentées : Tramonti de Maria Scapurlla, Inner Circles de Maarten Baas, les chaises Alu et Rocking Chair ainsi que les luminaires Lamps de Muller Van Severen et la toute récente collection Silent de BIG-GAME.
Un panel de collections qui se dévoile comme la vitrine d’un travail qui s’enrichit et se renforce depuis sept ans. Et pour l’occasion, les designers du studio suisse BIG-GAME étaient présents pour raconter l’histoire de la collection en bois Silent, qui se compose d’une chaise, d’une table, d’un tabouret et d’un banc. Une nouvelle collection toute en couleurs, avec des pièces qui rappelleraient « un peu celles que l’on pourrait retrouver dans l’atelier d’un peintre », pour reprendre les mots employés par BIG-GAME.
Silent, authentique et fonctionnelle
Au commencement de cette collaboration, le défi lancé était de proposer une collection de mobilier en bois. Un challenge relevé par le trio BIG-GAME, déjà familier du travail de valerie_objects. « On aime beaucoup la frontière qu’il peut y avoir entre l’art et le design dans les pièces de la marque. On ne sait pas trop si ce sont des œuvres d’art ou des objets réellement fonctionnels.« Pour cette collection, le studio confie avoir effectué un travail important au niveau des couleurs : « Nous avons essayé de sortir des palettes que l’on peut voir partout. On a imaginé des couleurs qui n’avaient pas de référentiel. « De la même manière, le travail de la matière et du toucher du bois a beaucoup importé les designers. En effet, ils confient avoir voulu créer un contraste entre l’aspect lisse et synthétique qui peut s’opérer à première vue, mais qui fait se dévoiler ensuite, si l’on s’attarde à observer les pièces de plus près, les veines marquées du bois, laissé ainsi volontairement.
Pour imaginer Silent, les designers se sont largement inspirés de l’art, en mixant un peu le modernisme de Mondrian avec le mouvement de Stein. Le résultat final donne des pièces colorées et géométriques, qu’on pourrait croire qu’elles sont tout droit sorties d’un pot de peinture. « On a voulu proposé un contraste entre le coté assez rigide et géométrique de la forme des pièces avec une palette de couleur assez tranchée. Cela créait un décalage qui vibre finalement assez fort.«
Les questions de recyclage et d’économie circulaire font partie intégrante des réflexions les plus actuelles des designers. Une tendance largement constatée en septembre dernier lors de la Stockholm Design Week, tant du côté des projets en cours de studios aussi emblématiques que Form Us WIth Love, que dans les présentations de plusieurs nouveaux produits sortant des ateliers et showrooms des créateurs locaux.
Pour le studio/collectif de designers Form Us With Love, désormais implanté dans son tout nouvel espace de création à Stockholm, la grande question est désormais de savoir comment le design peut aider les entreprises à réfléchir à de meilleures façons de gérer les déchets et de penser le recyclage.
Le recyclage au cœur du design
Depuis quelques temps, le studio de Stockholm Form Us With Love collabore avec de grandes marques suédoises comme par exemple le fabricant de produits d’aménagements intérieurs Baux, avec lequel il a notamment conçu et développé un matériau d’isolation acoustique totalement écologique, Acoustic Pulp, qui associe les qualités fondamentales exigées par cette industrie (résistance au feu et à l’humidité en particulier) à une biodégradabilité totale.
Dans le sillage de cette collaboration, Form Us With Love s’est aperçu que l’un des principaux défis aujourd’hui consistait à savoir comment traiter les énormes quantités de déchets existants pour les transformer en une nouvelle source de matière première. Avec Baux, le studio a donc travaillé sur des chutes de matières textiles pour imaginer une matière en feutre acoustique réutilisable afin de créer des panneaux isolants pour des environnements professionnels. Dans le même ordre d’idée, Form With Us Love travaille d’ailleurs également en ce moment avec l’entreprise Ludwig Svensson, spécialisée dans les matières technologiques pour l’agriculture sous serres, sur un projet de création de feutre traçable à partir d’écrans climatiques recyclés. Form Us With Love a également récemment collaboré avec IKEA pour créer la chaise Odger à partir de plastiques recyclés et de déchets de copeaux de bois récupérés.
Form Us With Love et le Royaume du Verre
Le principal souci dans le recyclage des énormes quantités de déchets industriels est que ceux-ci sont parfois impurs, car issus du mélange de différents matériaux ou contenant des matières toxiques, ce qui rend les processus de recyclage très complexes. C’est par exemple le cas du verre, dans lequel on peut trouver de l’arsenic ou du cadmium, rendant la réutilisation de ce matériau particulièrement sensible. Form Us With Love s’est donc associé sur un projet de recherche avec Rise, un laboratoire spécialisé dans le verre, et le groupe industriel suédois Ragn-Sells, spécialiste du recyclage, quant à la façon dont on pouvait recycler les nombreux déchets de l’industrie du verre encore stockés sur les sites industriels historiques du Småland, une région du sud du pays, historiquement connue sous le terme de « Royaume du Verre ». Le but de ce consortium est ainsi de trouver des moyens techniques de séparer les toxines du verre, mais pour Form Us With Love, l’objectif est avant tout d’identifier et de donner un aperçu pratique sur la façon dont ce verre décontaminé pourrait être recyclé dans des objets fonctionnels et produits à grande échelle. Comme l’indique Jonas Pettersson, directeur de Form Us With Love, « la diversité d’expertise de ce groupe offre une approche globale du problème qui est bénéficiaire pour tous. Nous apprenons ensemble, nous apprenons les uns des autres et tentons de mettre ce nouveau savoir partagé au service de nouvelles applications. »
Projets et prototypages en cours : Unit System
Structure collaborative par excellence, associée à différentes entreprises comme nous l’avons vu, mais regroupant aussi différents designers en son sein, Form Us With Love a d’ailleurs profité de l’occasion de la Stockholm Design Week pour présenter dans son atelier flambant neuf quelques projets de design en cours de prototypage ou de conception. Parmi eux, on peut citer le projet Unit System qui questionne la longévité d’objets conditionnés pour contenir des liquides ou des produits impropres à la consommation humaine (par exemple des lessives). Souvent, ces contenants sont jetés après usage. Form Us With Love réfléchit à la façon dont leur durée de vie peut être prolongée par le biais du réemploi (un peu comme des recharges que l’on pourrait reremplir et réutiliser). Des matériaux métalliques, comme l’aluminium ou l’acier, sont particulièrement étudiés pour leur capacité à être « reconfigurés » à multiples reprises et constituent en ce sens le cœur du système.
Zoom sur quatre mobiliers design et recyclés
Retour sur quatre collections et mobiliers présentés à la Stockholm Design Week qui mettent particulièrement en avant la notion de recyclage et d’économie circulaire, tant dans leur composition que dans leurs principes de réutilisation.
Lancée par la marque Flokk, la nouvelle série de chaises HÅG Tion se caractérise par sa fabrication réalisée avec 75% de matériaux recyclés (94 % pour les matières plastiques du siège et du dossier, et 98% en ce qui concerne les parties en aluminium) et un bois produit de manière durable. Sa création relève d’une collaboration entre l’équipe de design interne de Flokk (dirigée par Christian Lodgaard) et trois autres studios de design, dont le studio Hunting & Narud. Sa conception avec un minimum de composants – ce qui permet de limiter son temps de production et la consommation énergétique attenante – et sans colle en facilite à la fois la réparation et le recyclage. Par ailleurs, les peintures ayant servi au vaste choix de couleurs de ces chaises pratiques et élégantes se révèlent elles aussi à 100% recyclés et ne contiennent aucun additif chimique.
Le modèle de chaises hautes Nomole, créé par la designer Ronja Reuber pour Offect Sweden, se caractérise visuellement par son aspect minimaliste, épuré et presque ludique avec sa barre d’appui pour les pieds et son dossier court légèrement décroché, dessinant une silhouette très graphique et linéaire. Son nom même procède de cette tentation du « No More, No Less » (ni plus, ni moins) qui s’applique d’ailleurs à sa fabrication elle-même. Celle-ci est en effet basée sur l’utilisation de matériaux durables et recyclables, et vise comme le précise Ronja Reuber à « aller à l’essentiel, en utilisant le moins de matériel possible sans sacrifier l’expressivité ou l’usage ». La chaise Nomole peut ainsi être adaptée à différentes environnements, professionnels ou domestiques, et peut être facilement modifiée, réparée ou même réutilisée dans de nouveaux usages.
Issu des Ekbacken Studios de la designer Kristina Tjäder, la chaise lounge Eel (et les modèles annexes de table basse Eel Side et Octopus Side) se caractérise par son amusant aspect torsadé, évoquant les formes fluides et recourbées de l’anguille (ou de la pieuvre) donnant ainsi son nom au produit. Pour autant ce modèle et l’activité même des Ekbacken Studios s’inscrivent dans un principe généralisé d’économie circulaire ne se référant pas seulement à la mer pour de simples soucis esthétiques. Dans le sillage de l’initiative Peniche Ocean Watch et des recherches en nouveaux matériaux menés par Ocean Techno Hub (deux structures initiatrices à l’arrivée des Ekbacken Studios), l’idée conductrice est de permettre à travers cette conception de mobiliers le recyclage de vieux filets de pêche collectés directement auprès des pêcheurs locaux au Portugal. À partir de ceux-ci, un nouveau matériau, le PENYLON© a même été créé.
Le nouveau modèle de chaises Gemla Open Chair, imaginé par la marque Gemla, l’une des plus anciennes marques de mobilier suédoise, se caractérise par sa réalisation, entièrement faite à la main, via la technique du bois courbé. Cette technique, associée à l’utilisation d’essences de bois bien spécifiques (hêtre, frêne), est particulièrement économe tant dans son impact carbone que dans son usage de matériaux bruts. Elle entraîne de ce fait très peu de pertes de bois, et donc de déchets. Elle permet de créer des produits très légers, mais aussi particulièrement structurés dans leur forme, et s’inscrit pleinement dans un cercle vertueux de durabilité associant résistance et solidité du produit. Sa fabrication est également optimisée pour la gestion des stocks, puisque chacune des chaises Gemla Open est faite uniquement sur commande.
Si le crédo de la manufacture Roger Dubuis « No rules our game » (Notre jeu ne répond à aucune règle) ouvre le champ des possibles, la maison ne déroge pas à certains critères spécifiques à la haute horlogerie suisse. L’enfant terrible de la création horlogère a trouvé son équilibre entre passé, présent et futur en proposant une vision audacieuse, voire effrontée dans le monde merveilleux de la mesure du temps.
C’est au sein de la manufacture genevoise Patek Phillipe que l’horloger Roger Dubuis a officié avant de fonder sa propre marque en 1995. Roger Dubuis donne vie à des montres d’exception en laissant libre cours à des designs de caractère. À peine quatre ans plus tard, les créations sortant de la maison sont désormais marquées du Poinçon de Genève, sceau de qualité horlogère certifiant d’un standard d’excellence et emblème de la haute horlogerie genevoise. Ce gage de reconnaissance ultime, décerné à une maison aussi jeune, est notamment dû à la mise au point de mouvements propres à la marque. Aujourd’hui, 93% des montres manufacturées sont certifiées Poinçon de Genève, mais la maison tend à ce qu’elles le deviennent à 100% dans les années à venir.
Cinq ans plus tard, Richemont intègre la manufacture en tant que filiale du groupe de luxe, un tremplin qui permet à l’entreprise l’accès à des collaborations en interne. De nouveaux contrôles sont renforcés afin de développer un niveau de précision plus pointu. Ainsi, cinq ans après le lancement de l’Excalibur, au Poinçon de Genève vient s’ajouter la certification chronomètre COSC (Contrôle Officiel Suisse des Chronomètres).
Dans le tourbillon de la haute manufacture
En 2003, Roger Dubuis met au point son propre balancier spiral, un régulateur qui donne la précision à une montre grâce à des oscillations caractéristiques. La manufacture devient maîtresse d’un champ de création de plus en plus important, et deux ans plus tard, elle met au point son fer de lance, un des piliers de la marque : Excalibur. La montre se décline en 28 modèles, tous squelettés, avec un tourbillon à répétition minutes ainsi qu’un double tourbillon, véritable alliance entre prouesses techniques et design impertinent. La signature des montres est reconnaissable à son étoile stylisée, intégrée dans la boîte skeleton et trois cornes, interface entre le boitier et le bracelet.
Une bienfacture extravagante
Chez Roger Dubuis, on ne répond pas à une demande, elle est créée. C’est sans doute ce qui a rendu son succès fulgurant. La jeune marque produit peu de pièces par an, et le chiffre est d’ailleurs gardé confidentiel. Dans sa quête d’identité esthétique, la maison partage des valeurs communes avec la branche Squadra Corse, secteur dédié à la course, du constructeur automobile Lamborghini. En 2018, ils développent un partenariat qui va au-delà de l’apposition d’un nom sur un objet. Une nouvelle Excalibur nait alors, toujours en quête de perfection extravagante : la Spider Huracan.
Dans un autre genre, le fabricant s’est associé à l’artiste japonais Hajime Sorayama, reconnu pour sa quête perpétuelle de la beauté du corps et de la machine. De l’association de leur talent respectif nait l’Excalibur Sorayama monobalancier, sur laquelle les deux signatures se distinguent tout en fusionnant. De la course automobile à l’art contemporain, tout passe par la Recherche et Développement de la manufacture. Ici, le mot d’ordre est de s’inspirer du passé tout en se tournant vers le futur et l’impertinence. L’incubateur explore, tout en travaillant sur la légèreté, la gravité, ainsi que sur la recherche de matériaux innovants. Roger Dubuis remplace peu à peu l’acier par le titane plus léger et plus résistant, intègre le carbone tressé ou pressé dans l’élaboration de ses boîtiers et propose aujourd’hui une montre réalisée à base de cobalt.
Et si la perfection de l’hyper horlogerie a un coût, c’est qu’elle est réalisée selon les normes de bienfacture et de fiabilité les plus strictes, un hommage au dieu Chronos avec un temps qui passe vers un futur tout en excès.
À l’occasion de Paris + par Art Basel, la céramiste libanaise Souraya Haddad proposait une exposition en off, le 20 et 21 octobre. Le projet Ceramic Banquet, commissionné par House of Today, dévoilait une installation tout en rondeur et légèreté, habillée par les mets-objets de Balboste.
Depuis 2012, la plateforme de soutien au design libanais House of Today agit pour soutenir le design contemporain libanais, en élargissant le dialogue entre designers libanais et collectionneurs, journalistes, galeries, foires et institutions culturelles… La fondatrice de l’organisation Cherine Magrabi avait pour objectif de faire valoir la beauté du design libanais, en plaçant notamment l’accompagnement à 360° au des jeunes designers au cœur de son fonctionnement. House of Today est aujourd’hui devenue la plateforme de soutien la plus importante pour le design libanais, allant jusqu’à s’exporter au-delà des frontières libanaises. On peut citer des participations aux Biennales 2012, 2014, 2016 et 2018 à Beyrouth, ainsi que des participations à des foires notables telles que Design Miami, ou encore des co-curations avec des galeries à New-York, Aspen, Londres, Paris.
En off de Paris + by Art Basel, Cherine Magrabi ouvrait les portes de son appartement privé parisien pour y présenter le premier projet d’un cycle de collaborations qui allient à la fois des céramistes libanais et des designers culinaires.
Projet poly-sensoriel et inspirations culturelles
« Ma culture a joué un vrai rôle dans la conception de ce projet » assure Souraya Haddad. À travers la création de divers objets (tasses, plats, chandeliers…), le projet Ceramic Banquet célèbre à la fois la générosité, la créativité et la convivialité qui sont propres et caractéristiques au Liban, traduit par la rencontre entre créations sculpturales fonctionnelles et la poésie culinaire de Balboste. « J’ai voulu à la fois donner un aspect de légèreté, mais aussi un certain poids à mes créations. Tous les mouvements des pièces sont dans la rondeur, la générosité. Lorsque l’on prend un verre en main par exemple, on ressent qu’il y a quelque chose de chérissant, de plus intime. » Un projet finalement fastidieux, qui a demandé près de deux mois de recherches et d’expérimentation à Souraya Haddad avant d’arriver au résultat escompté.
Une exposition-performance qui alliait ainsi artisanat, design et saveurs, tout en restant fidèles à ses valeurs culturelles. Celle-ci se poursuivra en février à Los Angles durant Frieze 2023 avec l’exposition du travail de Nathalie Khayat dans la résidence de Santa Monica de Cherine Magrabi.
Il fait souvent partie des designers les plus cités. Il a travaillé avec les plus grandes marques, une liste sans fin : Hermès, Pierre Frey, ToolsGalerie, Ligne Roset, Habitat, Lexon, Tefal, Karakter ou Berluti. Guillaume Delvigne nous reçoit dans son studio à Montreuil, un espace qu’il partage avec une dizaine de « co-locs », heureux de co-habiter dans un lieu où chacun gère son temps à sa façon.
Après quelques années à travailler avec un assistant, depuis l’arrivée du Covid il exerce de nouveau seul. « J’ai eu un peu peur de devoir « charetter » tout le temps, faire du 24h/24h… mais avec l’expérience on devient efficace, j’ai trouvé mon rythme de croisière et ça marche plutôt bien. Mon emploi du temps est finalement dicté par les horaires de l’école de mon fils : 9h-18h, pas une amplitude énorme pour un designer mais depuis 6 ans je me suis habitué à ce rythme-là. Plus jeune je travaillais 12 heures par jour… mais c’est loin maintenant. »
Formation Nantes Atlantique
Il a été formé à l’Ecole de Design Nantes Atlantique à ses tout débuts quand elle avait encore un format presque familial. L’Ecole a déménagé cette année sur l’Ile de Nantes dans un nouveau bâtiment signé Marc Mimram, GPAA et l’agence Jouin Manku. Elle est passée de 100 à 1750 étudiants, 400 enseignants, 11600 m2 de superficie et 700 m2 d’espaces de fabrication. Depuis son diplôme en 2002, l’Ecole de design Nantes Atlantique a grandi et s’est installée sur le marché international des écoles de design.
« J’y ai fait les 5 années de formation en design industriel, à l’époque davantage vouée à former des designers intégrés que des indépendants. Beaucoup des alumni travaillent pour de grandes entreprises comme Decathlon, Airbus, Brandt… c’est une école qui a bonne réputation. J’ai fait partie des premiers à profiter du programme Erasmus, un élément clé dans mon parcours. J’adorais l’histoire du design italien, riche, fascinant, j’avais envie de vivre l’expérience italienne. Je suis parti au Politecnico de Milan et là-bas j’ai trouvé l’inverse de Nantes Atlantique, une sorte de grosse fac du design, pas très humaine. Mais il y avait des légendes parmi les enseignants, comme Andrea Branzi, Vico Magistretti ou Alessandro Mendini. J’ai choisi de suivre le projet encadré par Andrea Branzi ; il était là toutes les semaines et on avait des entretiens avec lui, ça m’a beaucoup marqué. On avait aussi des cours de 3D… on ne comprenait pas grand-chose mais on y allait. J’ai appris à parler italien aussi. Puis j’ai trouvé mon stage de fin d’étude chez George Sowden. J’ai travaillé deux ans chez lui et c’est là qu’on a lancé « In dust we trust ». C’est là aussi que j’ai rencontré d’autres jeunes designers comme Philippe Nigro ou Samuel Accoceberry, c’était il y a déjà presque 20 ans ! »
Le projet Villa Albertine
À New York, d’où il revient à peine, il travaille sur un projet lancé par le Mobilier national pour la Villa Albertine, un bâtiment classé du début du 20ème siècle, situé face à Central Park juste à côté du MET. L’intérieur est plutôt baroque, avec à chaque étage une intervention différente. L’objectif est de rénover la pièce du haut, un bel espace vouté de 60 m2 qui était l’atelier d’Helen Hay Whitney, riche artiste et poétesse de l’époque. Dans les années 1950 la demeure est rachetée par la France, qui y installe les services culturels de l’Ambassade de France aux Etats Unis.
« Pour faire court c’est un peu comme une Villa Medicis depuis laquelle la France répartit tous ses artistes aux USA. Le rez-de-chaussée est ouvert au public avec la plus grande librairie française de New York, au premier on trouve une salle de conférence puis au-dessus des bureaux. Le fameux dernier étage sera à la fois salle de réunion et de réception, type cocktail où dîner privé. On a carte blanche pour aménager la pièce mais sous un plafond classé en cours de rénovation, auquel on ne peut pas toucher, c’est un vrai défi. On doit aussi réfléchir à un mobilier spécifique qui s’adaptera aux changements de fonction de la salle. Quand j’ai vu ce projet passer, j’ai senti que je devais m’associer à un architecte, j’ai proposé l’idée à mon ami de longue date Vincent Eschalier qui a tout de suite accepté. Vincent gère maintenant une agence avec laquelle il mène de gros projets comme la Fédération Française de Rugby ou BlaBlaCar. On s’est rencontré quand on travaillait tous les deux chez Marc Newson à Paris, il était l’assistant de Sébastien Segers, l’architecte de Marc. Avec Vincent, nous partageons beaucoup de choses, c’est un amoureux du design et du détail, on se comprend. Il y a cinq équipes en lice sur ce concours : Hugo Toro, Dorothée Mélichzon, Maison Leuleu avec Sommer Lamm et le Studio Haddou Dufourcq. Nous sommes en train de concevoir le projet, résultats début novembre… »
Des projets Français
Pour rééquiper la salle Ovale de la Bibliothèque Nationale de France de la rue de Richelieu, il a été invité il y a 4 ans à concourir pour dessiner la chaise, en face de quelques designers comme Patrick Jouin (lauréat) ou Constance Guisset. Il y croyait, mais son projet n’est pas passé. « Pour la Villa Albertine, le travail des autres concurrents me semble plus « déco » que le mien, cela pourrait plaire au goût des américains mais le jury sera surtout français. Faut-il aller vers un « design-décor », certains proposeront de la tapisserie, du papier peint, du motif… On verra. Je suis resté 5 jours à New York pour m’immerger dans l’esprit de la ville. Je suis concentré sur cet objectif, je travaille l’essentiel de mon temps sur le projet… »
À l’international
« Pour l’aménagement de la Villa Albertine il y a une grande table modulable à dessiner, un véritable projet dans le projet. Bien sûr je compte proposer certains meubles récemment édités chez Pierre Frey, ils s’y prêtent et la maison connait bien le marché américain, ils y sont reconnus. On est également invité à puiser dans les collections du Mobilier national. J’y découvre des pièces fascinantes, le travail de Pierre Paulin évidemment me parle beaucoup, mais j’y trouve aussi des choses plus étranges, c’est très hétéroclite, un certain reflet de la création française ?»
Depuis deux ans il travaille pour Berluti, Maison de luxe du Groupe LVMH née en Italie en 1895 qui cultive un savoir-faire dans la maîtrise du cuir et de la patine. La rencontre a lieu grâce à Domeau & Pérès qui collaborent avec la marque depuis de longues années. Berluti cherchait un designer pour les aider à développer une ligne de mobilier et d’objets utilisant le cuir emblématique de la Maison, un souhait de leurs plus fidèles clients. Guillaume Delvigne a alors retrouvé avec plaisir le cuir, matériau auquel il avait goûté à l’occasion de sa collaboration avec Hermès il y a quelques années.
Pour Lexon, il a dessiné une collection d’accessoires nomades qu’il va bientôt compléter par une gourde, une brosse à dent de voyage et des couverts de pique-nique. Avec Loïc Bigot de la ToolsGalerie, chez qui il exposait en janvier 2022 une série de table d’appoint massives, ils observent que les ventes arrivent principalement par le biais d’internet, moins directement en galerie.
« Quand on regarde le paysage actuel on s’aperçoit que ce sont surtout les pièces extravagantes qui se vendent bien, et principalement à l’étranger, ajoute-t-il. Quand c’est plus sobre, c’est plus difficile, mon nom n’est pas assez bankable ! (rires) » Elisabeth Leriche l’a malgré tout invité à dessiner pour la CFOC des pièces en verre et laque, des coupes, des miroirs et des boîtes. Avec Maison Matisse, il prépare une collection d’objets autour d’une matière et d’une technique qui feront des clins d’œil au fameux Mille et Une Nuits du peintre. Un designer dans l’air du temps.
Duvivier Canapés dévoile Jacques, son nouveau fauteuil imaginé par Guillaume Hinfray, designer et directeur artistique de la marque depuis 2019, en hommage à Jacques-Émile Ruhlmann, ensemblier français ayant fait carrière dans les années 20.
Considéré comme l’un des maîtres de l’Art déco dans les années 1925, Jacques-Émile Ruhlmann (1879-1933) était surnommé à l’époque le « Riesener de l’Art déco », référence à l’un des ébénistes les plus en vogue à l’époque de Marie-Antoinette, et devenu un maître dans l’art du mobilier Louis XVI, à l’image de Ruhlmann pour l’Art déco. On peut citer parmi ses réalisations, le pavillon du Collectionneur, qui avait marqué les visiteurs l’exposition internationale des Arts Décoratifs et industriels modernes de Paris en 1925, autant pour l’architecture signée Pierre Patout que par sa décoration et son ameublement. Jacques-Émile Ruhlmann parlera alors d’un travail d’ensemblier et non de décorateur, invoquant le fait que l’ensemblier n’est pas uniquement en charge de la création de mobilier, mais travaille également la pièce qui l’entoure, du choix du papier peint, du fauteuil en passant par les luminaires.
Des lignes aux inspirations Art déco
Pur, sobre, rond et faussement simple, le fauteuil cabriolet Jacques s’inspire facilement des lignes modernistes, harmonieuses et symétriques du style Art déco. Avec son assise faite de cuir pleine fleur ou de lin du Nord dans un chaton de noyer, et dotée d’un coussin en plume, aucun détail n’est laissé au hasard pour procurer un confort inégalable.Fidèles à leur sens du détail, les équipes de Duvivier Canapés n’ont rien laissé au hasard. En effet, les pieds du fauteuil sont équipés de petits patins en cuir afin de protéger les sols les plus délicats. Un modèle signature, qui reflète une nouvelle fois l’excellence du savoir-faire artisanal que la maison perpétue depuis 1840.
À l’occasion de la Stockholm Design Week de septembre, le fabricant de luminaires Wästberg et le studio de design et d’architecture Claesson Koivisto Rune profitent du lancement de la nouvelle série w221 medium pour proposer une scénographie brute et immersive de leur collaboration dans le cadre éphémère d’une ancienne laverie.
En septembre, La Suède retrouvait des couleurs en termes de design avec la tenue d’une Stockholm Design Week exceptionnelle, marquant à la fois la fin d’une période pandémique particulièrement difficile pour les créateurs locaux et une préfiguration de la tenue normale de la manifestation, qui aura lieu l’an prochain en février à ses dates habituelles, parallèlement à la Stockholm Furniture & Light Fair. Si l’exposition officielle consacrée aux tendances actuelles du design scandinave, Moving Forward, occupait l’un des espaces du grand magasin NK au cœur de la capitale, de nombreux autres lieux, en particulier des showrooms de designers locaux comme Hem ou Flokk, marquaient l’évènement en invitant à venir découvrir leurs produits et créations. Dans ce cadre, une collaboration détonne : celle réunissant le fabricant de luminaires Wästberg et le studio de design et d’architecture Claesson Koivisto Rune autour du lancement de la nouvelle gamme de lampe à suspension medium w221.
Ballet de lampes
C’est en effet dans les sous-sols d’une ancienne laverie du centre de Stockholm que la marque et le studio de design avaient décidé de créer une véritable exposition en mode pop-up pour une semaine de durée. L’idée : présenter non seulement la nouvelle gamme, mais également les deux précédentes issues de la collaboration entre Wästberg et Claesson Koivisto Rune, à savoir les modèles extra petite w201 et extra large w151.
Dans cet espace réduit mais confortable en profondeur, brut de décoffrage avec ses murs en béton mais épousant parfaitement l’esthétique minimaliste des lampes, le rendu visuel est saisissant. Un véritable ballet de lampes coniques aux tailles variables, plus ou moins évasées dans leurs formes exagérées, et où le contraste de couleurs entre les blancs et les noirs renforcent la nature brutaliste, se dévoile. « C’est le seul moment où l’on peut voir tous ces modèles réunit ensemble » se réjouit Eero Koivisto, en se réjouissant d’avoir pu mener à bien ce projet d’exposition éphémère et de scénographie des lieux en si peu de temps. « Notre idée était de mettre en valeur les lampes tout en préservant la nature brute des lieux dans la façon de les montrer. Il y a un choix d’harmonie brute dans le fait d’accorder les lampes en coloris noir du côté des murs les plus blancs, et inversement, les lampes en coloris blancs du côté des murs plus sombres. Nous avons également pensé le mobilier qui enserre le dispositif des lampes en réemployant des canapés eux aussi très bruts et minimalistes dans leur format ».
Opportunément, la série de lampes à suspension w221 vient s’intercaler entre les plus grands modèles x151 et les petits modèles x201. Les jeux de proportion entre les différentes pièces sont donc eux aussi particulièrement valorisés dans la mise en scène. « Nous avons introduit une distance progressive entre les différentes pièces, les plus petites et les plus grandes, afin de créer une véritable perspective visuelle », poursuit Eero Koivisto.
Éloge de la durée
Le rapport au béton se fait encore plus pertinent quand on en vient à son point de convergence avec les luminaires Wästberg dans cette scénographie très spéciale. « Le symbole de qualité d’un produit est sa capacité à durer », rappelle Eero Koivisto. « Le rapport avec cet écrin d’exposition en béton, lui-même fait pour durer, fait donc sens. » Cette qualité temporelle des produits Wästberg transparaît notablement dans cette nouvelle gamme de lampes à suspension médium. Quatre ans après avoir sorti la gamme extra large x151 et trois ans après avoir édité la gamme extra petite x201, le modèle médium en reprend les grandes lignes dans des dimensions plus abordables : solidité, avec ce travail de manufacture métallique semblant toujours repousser les limites du potentiel de l’aluminium ; utilisation de LED pour un éclairage économique et écologique ; capacité à jouer de l’articulation des formes et des silhouettes des lampes pour créer des environnements originaux et intimistes.
« Nous avons une nouvelle fois pris le temps pour penser les différentes formes de cette gamme, réfléchir aux questions de dynamique et de symétrie, et la rendre cohérente avec les autres gammes », précise Eero Koivisto. « Cela nous a pris deux ans de travail, mais nous aimons prendre du temps pour travailler et ainsi parfaitement réfléchir au produit que nous concevons. »
Un contraste entre temps de création et temps de monstration qui renvoie à l’autre grande actualité du studio cette année, la sortie de la collection 822 pour la marque Ton, conçue elle aussi pour durer de longues années. Inspirée du modèle années 30 de la chaise 811 de l’architecte/designer Josef Hoffmann, la collection 822 transpose la patte Claesson Koivisto Rune et un caractère nordique plus moderne dans l’univers maîtrisé de la courbure du bois cintré chère au fabricant de mobilier tchèque.
Les performations dans le siège et le dossier donnent une dimension particulièrement légère et graphique à une collection où tous les éléments arrondis et cintrés caractéristiques de Ton ont justement été redressés pour paraître plus géométriques dans toutes les déclinaisons colorées et parfois atypiques de la collection (fauteuil lounge, tabouret de bar ou tabouret bas). Une manière également pour Claesson Koivisto Rune, comme dans la dimension scénographique de l’exposition pop-up Wästberg, de toujours réfléchir à l’adaptation d’un design existant à de nouveaux lieux et à de nouvelles fonctions.
L’adresse emblématique de la maison Carita au Faubourg Saint-Honoré s’est permis une remise en beauté. Un projet de réhabilitation qui a demandé plus de deux ans de travaux et qui a été mené par le studio REV, formé par le duo d’architectes franco-italien Sophie Thuillier et Cristiano Benzoni.
Créée en 1946 par les soeurs Maria et Rosy Carita, la maison de beauté Carita – membre du groupe l’Oréal depuis 2014 – prend soin de tous ceux qui franchissent ses portes depuis plus de 70 ans. Logée au 11 rue du Faubourg Saint-Honoré depuis 1952, cette adresse emblématique avait été mise en pause pour deux ans le temps de travaux de réhabilitation. Sous la direction du studio REV, retenu pour prendre en charge le projet, la nouvelle maison Carita propose une expérience à la hauteur de l’héritage de la marque. « Nous avons voulu travailler sur un système de luxe sobre, en travaillant l’architecture de manière à proposer une identité qui soit noble. »
Un projet de restructuration total
Pour cette restructuration, c’est toute l’architecture du lieu qui a été repensée, en commençant par son entrée. Longue d’une dizaine de mètres, cette allée qui s’avère être une ancienne cour d’immeuble, méritait d’être appréhendée différemment. Partant avec la contrainte de ne pas avoir de vitrine sur rue comme peuvent l’avoir d’autres enseignes, les architectes du studio REV ont voulu renverser cette tendance et imaginer une solution pour que cette distance avant d’arriver à la boutique soit plus courte, et attire le client vers l’intérieur. Ils ont donc créé cette arche afin de « faire sentir que la boutique démarre dès le porche. Notre volonté était d’intriguer et d’aspirer les clients dès l’entrée « témoigne Sophie Thuillier.
Au sein de la maison de beauté, qui s’élève sur cinq étages, se dévoile une sorte de promenade architecturale. Des jeux d’ombres et de lumières provoquées par les 777 pastilles du lustre sur mesure qui surplombe le lieu, s’accordent avec le reste de l’architecture du lieu. « Nous avons voulu inviter au maximum la lumière au sein de l’espace et la travailler comme une matière à part entière » explique Cristiano Benzoni. Le noir et le blanc sont les couleurs dominantes, dans l’optique de rester fidèles à l’identité de la marque. Pour autant, des pointes de rose pâle (en référence à la couleur chair de la peau), ont été ajoutées subtilement pour apporter une touche de sensualité et d’élégance.
Un engagement environnemental
Si le projet de départ était celui de repenser le lieu, les architectes du studio REV ont veillé à adopter une démarche RSE, à travers l’utilisation de matériaux recyclés, comme la réutilisation de 80 % des chutes de gravas récupérés après démolition. Ainsi, la majorité des matériaux utilisés sont naturels, géosourcés et durables dans le temps. De la même manière, tous les partenaires ayant participé au projet sont eux-mêmes engagés et ont été choisis spécifiquement pour cette raison.
Et cet engagement se retrouve au-delà du chantier puisqu’un travail sur l’éclairage a également été réalisé de manière à faire des économies d’énergie. Aussi, la Maison de beauté Carita bénéficiera de la technologie « Water Saver Portfolio », pour réduire la consommation d’eau à travers l’installation de la «douchette» innovante, fruit d’un partenariat entre L’Oréal et Gjosa. Cette dernière équipera tous les bacs à shampooings de la partie salon et permettra d’économiser jusqu’à 60 % d’eau !
Un service sur-mesure, comme à la maison
Hormis cet aspect architectural, la maison de beauté Carita, c’est avant tout une expérience unique de soins. Chaque étage du salon propose un service différent, répondant aux besoins de chaque client. En effet, l’adresse du Faubourg Saint-Honoré est équipée d’un espace boutique, d’un salon de coiffure, d’un espace dédié au regard, de 11 cabines – dont une double – permettant de prodiguer les meilleurs soins en toute intimité et du restaurant le Rosy, tenu par la cheffe Amandine Choignon.
Autre service prestigieux du lieu : la mise à disposition d’un appartement de beauté que les clients peuvent privatiser pour une journée ou quelques heures… Tout est possible. « Nous avons voulu créer une transition qui soit la plus fluide possible pour chaque espace pour ne pas avoir la sensation d’être dans une boutique classique. Car la maison de beauté Carita n’a rien de classique » concluent Sophie Thuillier et Cristiano Benzoni.
Organisée par le collectif “United Artists for Ukraine », et sous l’égide de la fondation franco- britannique Hexagon Society, une vente aux enchères en faveur des institutions culturelles ukrainiennes se tiendra le dimanche 6 novembre, à l’Institut du Monde Arabe.
Depuis le début de la guerre en Ukraine, de nombreuses institutions culturelles ont été affectées. Pour apporter leur soutien, le collectif “United Artists for Ukraine » a décidé d’organiser une vente aux enchères, dont la totalité des bénéfices sera reversée à ces institutions. Avec l’aide de l’institut Ukrainien de la Culture, huit projets ont été soigneusement sélectionnés parmi les principales institutions culturelles du pays : Odesa Fine Arts Museum, The National Art Museum of Ukraine, The Ukrainian Institute, The Ukrainian Cultural Foundation. Cette vente aux enchères se tiendra le dimanche 6 novembre, à l’Institut du Monde Arabe à Paris, à partir de 19h, en présence de Jack Lang et de l’ambassadeur d’Ukraine en France.
La soirée sera ponctuée de plusieurs performances, dont un concert de Pop-ukrainienne, un DJ Set de « La Boum », ou encore la projection en avant-première du ballet-hologramme « HOPE » de l’artiste du collectif Marie Beltrami.
Des lots sous forme de NFT
De plus en plus actuels, les NFT s’inviteront à la fête et seront même au coeur de cette vente aux enchères. En effet, les lots proposés sont sous forme des cartes de membres au format NFT, créées par l’artiste Iryna Ozarinskaya. Celles-ci donnent à leurs acquéreurs accès à des visites d’ateliers et des rencontres chez les artistes du collectif, à des moments privilégiés avec des personnalités du monde de l’art, à des vernissages et des soirées privées. Les cartes de membres seront mises en vente à partir du 2 novembre sur le site de la plateforme Collection : https://bit.ly/3zadoJd. Chaque NFT est authentifié, approuvé par le musée, la galerie ou l’artiste concerné, et sécurisé sur la blockchain.
Pour cette vente, les galeries Aika, Diapo Gallery NFT, DSL Collection, Opera Gallery, Galerie PACT, Perrotin, Shifting Vision, Thaddaeus Ropac gallery, T&L gallery, Wizard Gallery ainsi que les magazines spécialisés Whitewall magazine, Purple magazine et The Art Newspaper sont partenaires de l’évènement.
Pour assister à la vente : UAFU.eventbrite.com