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En novembre prochain, ce sera au tour de Matali Crasset d’investir le Campus MaNa durant deux jours. Cet atelier express sera dédié à une création collective pérenne qui s’appuiera sur sa mise en œuvre, tout en prenant en considération la notion de temporalité.
Depuis sa sortie de l’ENSCI dans les années 90, la designer de renommée internationale défend un design qui contribue au vivre ensemble. Sa formation en design industriel l’a mené à travailler autant à la conception d’objets et de mobilier du quotidien qu’en architecture ou encore en aménagement d’espaces. Avant tout, Matali Crasset est une femme engagée. Pour chacun de ses projets, elle met tout en œuvre pour innover socialement, artistiquement mais aussi écologiquement.
Pour cet atelier, elle propose d’imaginer un four solaire, attenant à une table d’hôtes, qui sera destiné au jardin du campus. Le processus de création débutera par une réflexion commune dans le but de définir l’usage et l’emplacement du mobilier. Scindé en deux groupes, l’un dédié à la mise en œuvre du four à partir de fines couches d’aluminium et le second à la création de la table et des assises en bois, le workshop investira les ateliers bois et métal. Il sera l’occasion d’acquérir des connaissances pour créer dans « l’urgence », cuire de manière douce pour une collectivité, proposer des rituels autres pour générer de l’énergie. Voici une belle façon de conjuguer une création deux en une et une approche du temps dans un monde où tout va toujours trop vite !
Durée et modalité d’organisation
Public visé : Autodidacte ou diplômé de la discipline, justifiant d’une expérience qui est évaluée lors du processus d’admission
Prérequis : Justifier d’une expérience qui est évaluée lors du processus d’admission
Étape 1 : envoi d’un portfolio et d’un cv
Étape 2 : validation de la candidature par le jury d’admission qui s’assure de l’adéquation entre le profil et les exigences de la formation.
Dates : 17/11/2023 au 19/11/2023
Horaires : 10h-13h — 14h-18h mardi au jeudi : 9h -13h — 14h-18h
Interactions physiques à travers le temps et l’espace, détournement du machine learning célébrant les circuits courts ou orchestration lumineuse de catastrophes climatiques répétées : le design emploie sens critique et lignes formelles pour guider la matérialité de l’exposition centrale du très numérique festival Scopitone.
En s’intéressant aux nouveaux rapports entre voyage et mobilité permis par les outils numériques et leur interprétation artistique nomade, l’exposition centrale du festival nantais Scopitone ouvre un large champ esthétique dans lequel le design trouve une place presque rassurante. Au milieu des paysages abstraits numériques – comme ces impressionnantes impressions digitales de souches d’arbres enchevêtrées, traduisant dans les Artefacts de Paul Duncombe le lointain écho d’une chute météorite gravée dans le sol du grand nord québécois – ou des scénographies art/science ouvertes sur les mises en son d’aurores boréales ou les mutations d’espaces vivantes imaginaires, des objets et installations plus formels témoignent d’une matérialité palpable, du moins en apparence.
Reproduisant les mouvements de la mer à partir des données récupérées en temps réel par une bouée connectée partie à la dérive depuis douze ans, la pièce Tele-Present Water de David Bowen instaure un étrange rapport d’interaction entre les mouvements gracieux et hypnotiques d’une grille métallique articulée et un phénomène d’absence, de disparition auquel la technologie vient en quelque sorte palier en faisant fi des notions de distance. Un design immatériel presque puisque sans contact physique qui fait écho au design intemporel de Stéphanie Roland dans la pièce Science-Fiction Postcards voisine. Ici, un mur-présentoir accueille des dizaines de petites cartes postales monochromes noires. Une fois présentées devant un appareil chauffant, celles-ci laissent apparaître au recto des rémanences de territoires insulaires isolés tandis que le verso en indique la localisation lointaine et la fin programmée du fait du réchauffement climatique. Humour…noir, bien sûr, où l’objet prend vie au fur et à mesure que sa temporalité se dilate.
Mimer l’intelligence artificielle peut faire rayonner le design critique
Dans ce design d’objet curieux, la palme du dispositif revient au cabinet de curiosités inspiré des modes de calcul de l’intelligence artificielle du Of Machines Learning To See Lemon d’Alistair McClymont et John Fass. En mimant les principes de la technologie du machine learning, les deux créateurs s’amusent à interpréter manuellement la façon dont une IA aurait pu classifier et répartir dans un espace physique donné, se présentant ici sous forme de rayonnage à casiers géant, les objets se rapprochant – ou à l’inverse s’éloignant – d’un simple citron. Une démonstration de design plastique, qui se veut surtout éminemment critique puisque venant opposer aux circuits imprimés de la machine les circuits courts des produits ainsi présentés, tous récupérés in-situ.
Bien évidemment, la pièce la plus monumentale de l’exposition, l’installation lumineuse Cymopolée du studio Luminariste qui trône au milieu de l’esplanade extérieure s’avère de facto la plus démonstrative. Sa structure métallique vient subitement s’éveiller de torsades lumineuses spasmodiques, de jeux de fumée et d’ambiances sonores redoutables ou harmonieuses évoquant le passage d’un ouragan, avec ses pics intensifs et ses temps plus suspensifs. Son design évoque là une mobilité voyageuse subie, celle de la tempête qui nous guette, nous surplombe, puis s’éloigne. Un cycle dont la fatalité renvoie ici autant à la force des éléments qu’à nos propres incapacités collectives à lutter contre un monde de plus en plus naturellement déréglé.
Parmi les grandes marques d’éditeurs et les jeunes designers talentueux, dans les allées de Maison & Objet, repérage de produits à découvrir sous la thématique « Enjoy ».
Modularité colorée
Déjà présent dans les collections, le canapé Bolster de Fést se déploie en méridienne. Modulable, composable, il offre la possibilité de créer de nombreuses configurations selon l’espace. Dessiné par le designer Martin Hirth, il est recouvert de tissus Kvadrat dans une large palette de coloris.
Recyclé et imprimé
Lorsque qu’il était étudiant, le designer Dirk van der Kooij a découvert l’impression 3D et en a fait sa technique de prédilection pour ses créations. A partir de plastiques recyclés, il a conçu la chaise Chubby, un modèle ludique fabriqué en petites séries avec ce process.
Perles rares
Pour son premier salon, la jeune marque finlandaise Quu, fondée par la designeuse et architecte d’intérieur Heli Mäkiranta se distingue par sa créativité. Elle associe la douceur du style scandinave intemporel à la beauté des matériaux tels que le bois, le verre ou la céramique.
Valeur sûre
La collection de tables basses PL dessinée par Alain van Havre pour Ethnicraft exprime toute la force d’un design proche de la nature. Chaque pièce en acajou teinté et vernis est polie à la main garantissant son unicité.
Beau verre
Chaque table est unique et produite en petite série ; elle met en lumière la beauté visuelle et tactile du verre. La collection se complète de petits objets, patères, vide-poche dans un esprit résolument seventies. Par le studio Melle Jo.
Crédit photo : Joan Bebronne
Organique
Le designer belge Sylvain Willenz bouleverse les codes de la géométrie en dessinant pour Pulpo la petite table Offset en céramique brillante ; les lignes ont été tracées à la main afin d’être au plus près du grain de la matière.
Ping Pong chic
La collaboration entre Giobagnara et Poltrona Frau, deux marques de l’excellence du Made in Italy, a donné naissance à une collection basée sur le travail du cuir et dédiée au fitness.
Transparence du bois
Grâce à un système coulissant, la feuille de placage qui compose cette lampe artisanale se déplace de haut en bas pour orienter la lumière. Son nom découle du jargon de l’ébéniste, à savoir l’épaisseur du placage de 6/10ème de millimètres. Par Oros Editions, fabrication en France.
Ça roule
Le scooter électrique CEB conceptualisé par Athime de Crécy répond à la mobilité dans l’air du temps et préfigure le design de demain. Il a été sélectionné par Philippe Starck dans le cadre des Rising Talents Awards, au salon Maison & Objet.
Dans un geste radical, l’artiste et designer d’origine grecque bâtit une typologie de meubles hybridés dont l’archaïsme travaillé brouille les frontières temporelles et questionne notre rapport au matériel.
Chaque automne, lors de la Dutch Design Week, l’Académie de design d’Eindhoven présente le travail de ses élèves diplômés. En 2017, celui de Kostas Lambridis a marqué les esprits. Auparavant formé au département ingénierie de l’Université de la mer Égée à Syros, l’étudiant grec a suivi le programme en master option design contextuel, alors qu’il assiste depuis plusieurs années déjà le designer espagnol Nacho Carbonell dans son studio d’Eindhoven. « J’étais vraiment dans le design industriel, Je pensais que j’allais dessiner des voitures, puis j’ai rencontré Nacho, et l’idée de créer des pièces sculpturales avec mes mains est devenue très excitante ». Exposé dans le campus de l’Académie, son étonnant projet de près de quatre mètres de haut trônait en majesté, re-création grandeur nature du Cabinet Badmington, un chef d’œuvre baroque du XVIIIème siècle vendu aux enchères 19 millions de livres sterling.
Une multitude de matériaux
À l’instar de cette pièce monumentale, l’Elemental Cabinet de Lambridis intègre une multitude de matériaux. Non pas bois d’ébène, ivoire, bronze doré et mosaïques de pierres dures comme magnifiquement travaillés sur l’ouvrage de référence, mais plutôt fonte, béton, plastique, bronze, céramique, textile brodé… « Mon idée était d’emprunter la forme et le symbole de la plus importante pièce de mobilier jamais fabriquée, et d’essayer d’aller contre cette hiérarchie des matériaux et des savoir-faire ». Irrévérencieuse et spectaculaire, la réplique a tapé dans l’œil des galeristes Julien Lombrail et Loïc Le Gaillard, friands de talents oeuvrant aux frontières de l’art et du design. Kostas Lambridis rejoindra l’écurie de la Carpenters Workshop Gallery, et une exposition personnelle lui sera consacrée au sein de l’espace parisien en 2021, après que de nouvelles pièces aient été montrées à la Fondation Cartier dans l’exposition collective « Jeunes artistes en Europe. Métamorphose. »
Vers un processus de déconstruction
Installé en Grèce désormais, le designer et son équipe explorent les métissages créatifs dans un grand atelier du nord d’Athènes. Abritant des matériaux de toutes sortes, collectés, récupérés, le lieu se divise en divers postes de travail dédiés à la fabrication et au travail du bois, du métal, du verre, de la pierre et du marbre, de la céramique, du cuir, du plastique, etc. Outre l’Elemental Cabinet et la bibliothèque It’s not enough, une vision éclatée de celle d’Etore Sottsass, Carlton, le jeune homme s’est intéressé à d’autres références de pièces iconiques, mais sans recréer d’objet spécifique. « Pour le daybed Her par exemple, j’ai regardé du côté des canapés, chaises, fauteuils dessinés depuis les temps préhistoriques, la Grèce ancienne, les meubles byzantins, les années 70 et 80, et jusqu’aux designers contemporains, Marc Newson et sa Lockeed lounge chair en l’occurrence ». Récemment, pour ne pas se laisser enfermer dans un style, Kostas Lambridis a amorcé un processus de déconstruction de son travail. « J’ai déjà créé une trentaine de pièces en mixant les matériaux. C’était difficile à faire, mais en même temps sécurisant pour moi. Pour aller vers la simplicité, le challenge est maintenant de les séparer ».
Lors de l’exposition qui se tiendra du 8 septembre au 23 novembre 2023 à la Carpenters workshop gallery de New York, l’artiste présentera une nouvelle famille de pièces, mono-matière cette fois, comprenant une diner table en bois, une table basse en pierre, un buffet bar en métal, une console en plastique… « mais toujours composée de readymade et de parties que nous créons, précieuses ou sans valeur, ouvragées ou laissées brutes » précise-t-il.
Après avoir évolué depuis 20 ans dans différents services d’Orange, Édouard Olivier intègre le Cercle Parnasse en tant que directeur Marque, Communication, Digital et Évènementiel.
Après avoir démarré sa carrière chez Volvo puis chez DAEWOO Automobiles, Edouard Olivier a rejoint Orange au sein de la filiale Wanadoo en 2000, en tant que responsable média France. En 2008, il prend en charge la marque, le budget marketing et communication et la direction des publications clients chez Orange Business Services, puis y devient directeur de la Communication Corporate et de la Marque jusqu’à mi-2017. Précédemment directeur des Programmes d’engagement salariés et animation au sein du groupe Orange, Édouard Olivier a rejoint Parnasse en octobre dernier en tant que directeur Marque, Communication, Digital et Évènementiel.
Depuis douze ans, le Cercle Parnasse est adossé au groupe Orange et lui sert notamment de laboratoire de la relation client. Dans un monde ultra-digitalisé, l’entreprise propose ainsi un accompagnement personnalisé de coaching numérique : le Cercle Parnasse se pose ainsi comme « éclaireur » des mutations engendrées par la révolution numérique dans nos vies quotidiennes, professionnelles et personnelles. À l’origine pensé comme une sorte de « conciergerie numérique », le Cercle Parnasse a naturellement développé de nombreuses prestations de conseils, de services à domicile, qui vont de la télésurveillance à la domotique.
Selon Edouard Olivier :
“Dans un monde aussi digitalisé que le nôtre, la complexité du numérique ne doit pas être un frein à l’usage. Chez Parnasse, on retrouve le vrai luxe : celui de la relation individualisée et personnalisée”.
Son nom signe des créations comme on appose un sceau. Pour les nostalgiques, il est avant tout l’iconoclaste qui a secoué la sphère du design français dès les années 1980 et l’a menée sur la scène internationale. Pour les aficionados, cet inclassable visionnaire illumine tout ce qu’il touche. Pour les esprits chagrins, c’est un label « bankable » par sa notoriété, qui dépasse bien largement l’audience habituelle du design. Repris ad libitum, le cliché d’« enfant terrible du design » occulte le bourreau de travail qui remet sans cesse les compteurs à zéro pour innover. Si l’on s’arrête sur les données, sa carrière donne le vertige : plus de 860 créations – de l’objet au véhicule, en passant par le mobilier et le luminaire –, plus de 180 projets d’architecture réalisés, plus de 300 prix et distinctions reçus, plus de 70 expositions… Sans compter les projets dans les cartons ou ceux en cours, de la voiture à hydrogène H+ au complexe d’entraînement pour les astronautes d’Orbite… sans oublier des cannes ergonomiques ! Pour ce numéro spécial « Design en France », avec l’élégance de l’expérience, il nous partage sa vision de la génération montante et le fonctionnement de son agence.
Comment percevez-vous la génération actuelle ?
Les jeunes créateurs actuels sont fantastiques, parce qu’ils sont nés dans une société en voie de dématérialisation. Or le futur est la dématérialisation. J’aurais aimé pouvoir créer davantage en m’émancipant de la matière, que je considère comme vulgaire. Hélas, cela n’appartenait pas à ma génération, mais en cela, la nouvelle sera meilleure.
Comment vous positionnez-vous vis-à-vis d’elle ?
Chaque génération change, de plus en plus rapidement et de plus en plus profondément. Je travaille toujours seul, face à moi-même, avec mon bloc de papier calque et mon critérium, afin de rendre le meilleur service à ma communauté. Je n’utilise pas de téléphone ou d’ordinateur, car vous êtes nécessairement limité par la technologie, par le logiciel. Notre cerveau est l’ordinateur le plus puissant ; avec mon crayon et ma feuille, ma seule limite est mon imagination.
Quelles sont ses forces ? Ses faiblesses ?
Cette nouvelle génération retrouve des valeurs éthiques, sur le modèle de designers italiens communistes tels qu’Enzo Mari. Ils ont conscience qu’ils doivent faire face aux paramètres urgents de notre époque, comme la dimension écologique. L’important est de retrouver des valeurs simples et pérennes, de vivre en harmonie et intelligemment.
La diversification et l’omniprésence des réseaux sociaux, notamment, font qu’ils regardent beaucoup plus ce que les autres font, ils se comparent et s’inspirent les uns les autres. Or la première chose est de comprendre que tout ce qui vient de vous doit vraiment venir de vous. Je pense que tous les matins il faut être un cheval et passer un obstacle. Le mieux est de ne pas tomber, de réussir à passer l’obstacle et, le lendemain, d’en passer un encore plus grand. Pour cela il faut être seul, face à soi-même. Il faut comprendre qui l’on est, et son potentiel. Comprendre réellement ce qui vous intéresse. Puis, il ne faut pas écouter les gens, lire les journaux, regarder la télévision ni se rendre dans les soirées mondaines. Il faut vivre comme un ermite. C’est difficile quand on est jeune, mais c’est la seule façon de pouvoir apporter au monde une idée fraîche, parce qu’elle sera sortie de vous. Qu’elle soit bonne ou mauvaise, ce n’est pas le sujet. L’important est que vous ayez créé avec un engagement total, avec la plus grande honnêteté, la plus grande largeur d’esprit et la plus grande générosité. Et si personne n’a compris l’idée, tant pis. Il ne faut pas écouter les avis. À un moment ou à un autre, le temps vous rattrapera signifiant que vous étiez en avance. C’est formidable d’être en avance, c’est un devoir.
Qu’attendez-vous de cette génération ?
Cette génération ne doit pas entrer dans le jeu du marketing et être la complice de la sur-séduction, car cela incite à l’achat de quelque chose dont nous n’avons pas besoin et qui étouffe le monde. La partie intelligente de la production humaine s’appelle la dématérialisation. C’est-à-dire qu’autour de nous notre production intelligente augmente la qualité, augmente la puissance, augmente l’intelligence tout en faisant décroître la matière. Il y aura de moins en moins de matière et de moins en moins d’objets. Heureusement, parce que plus il y a de matière, moins il y a d’humanité. Aujourd’hui, un designer doit penser à des services immatériels ou à des objets à condition qu’ils offrent un véritable service à la communauté, qu’ils soient utiles et durables, pensés dans des matériaux intelligents.
Et à l’inverse, au regard de votre carrière et de votre notoriété, ressentez-vous une pression d’être un ambassadeur du design ?
Le design est juste un moyen faible d’exprimer des idées et des concepts. Cependant je suis conscient, en tant qu’être humain, de mon devoir de transmission, de mon rôle dans l’histoire et l’évolution de l’humanité.
Comment sourcez-vous les jeunes talents ?
Pour être honnête, je ne m’intéresse pas du tout au design. Je travaille seul de douze à quatorze heures par jour, en restant concentré sur des sujets compliqués. Donc je n’ai pas le temps de regarder ce que les autres font. Pour cette édition des Rising Talent Awards, à laquelle je suis honoré d’avoir été invité en tant que président, j’ai eu l’occasion de découvrir des jeunes designers à travers la sélection du jury. J’ai choisi Athime de Crécy, qui a travaillé dans mon agence et qui possède une grande et rare singularité.
Votre agence comprend un département en design et un autre en architecture. Comment fonctionnez-vous avec vos équipes ?
Ayant une longue carrière, j’ai la chance d’avoir un réseau Starck, que nous appelons le Starck Network, très diversifié et fort, regroupant différentes expertises. Je dessine tout moi-même, seul, au milieu de la forêt et des dunes, et ma formidable équipe de « Formule 1 » développe sur ordinateur. Il s’agit d’une équipe minuscule, composée de quatre personnes en design et d’un peu plus en architecture. Nous travaillons en moyenne sur 250 projets par an. Cela veut dire que je travaille et que nous travaillons tous beaucoup.
Comment le sourcing, point fort de l’agence, est-il organisé ?
Je ne suis ni designer ni architecte. Je suis un explorateur qui explore un peu de tout. Ensuite, j’ai des choses à raconter. Toute ma vie, j’ai travaillé avec des matériaux intelligents. Des matières issues de l’intelligence de l’homme, quelles qu’elles soient, pour ne pas avoir à utiliser uniquement les matériaux issus de la nature, parce que les matières naturelles sont des matières vivantes. La recherche de nouveaux matériaux est constante, pour plus de durabilité, plus de produits biosourcés. C’est un défi que nous avons relevé par exemple avec Kartell ou encore avec la recherche d’un contreplaqué moulé, en trois dimensions, que nous avons fait avec Andreu World. Au-delà des matériaux, il y a de bonnes marques qui inventent et font des produits de qualité, intelligents. En général, ce sont celles avec lesquelles nous travaillons.
Comment fonctionnez-vous dans le suivi des projets ?
La réalisation d’un projet, du concept à sa matérialisation, prend en moyenne de cinq à dix ans en architecture, et environ de deux à quatre ans en design. Avec mon équipe, je suis toutes les étapes, dans les moindres détails – car le diable est dans les détails. En architecture comme en design, un bon design se joue souvent au dixième de millimètre près.
Comment garantissez-vous en interne une signature Starck avec une nécessaire délégation dans la réalisation de projets (pour les produits comme pour les aménagements) ?
Les principes fondamentaux sont : la créativité, la vision la plus élevée, la vision la plus lointaine pour cette créativité, l’honnêteté absolue et le travail, le travail, le travail, le travail. Et essayer d’être bon, d’être une bonne personne, d’être toujours dans l’élégance – non pas vestimentaire – mais du rapport aux autres. Le projet n’est que le résultat de l’élégance dans les rapports entre les partenaires pendant tout le processus.
Comment l’équipe est-elle recrutée ?
Nous recevons des candidatures régulièrement, et dès lors que nous avons un besoin, je contacte directement les designers dont les profils m’intéressent. Pour ce qui est des autres domaines d’expertise, c’est ma femme qui s’en occupe.
Quelle fidélité existe-t-il avec ceux qui partent se mettre à leur compte ensuite ?
Tout créateur a une responsabilité, et fréquemment il finit par voler de ses propres ailes un jour ou l’autre. Aujourd’hui, je suis content de voir le travail que proposent d’anciens collaborateurs et d’anciennes collaboratrices dont les réalisations rendent de réels services à leur communauté, tels que Matali Crasset, Ambroise Maggiar ou encore Athime de Crécy.
French Touch
Pour ce numéro de rentrée, Intramuros porte haut les couleurs de l’ Hexagone pour décrypter une French Touch. Et s’intéresse à ce qui se passe en région et sur tout le territoire : comment le design valorise les savoir-faire, aide à diversifier les activités des entreprises ? Comment les designers appuient les circuits courts et le Made in France ? Sans oublier ces formations qui investissent le monde rural.
Et bien sûr, tout au long du magazine et à travers sa sélection de portraits habituels, la rédaction donne un panorama des acteurs de ce soft power français, de Noé Duchaufour à Axel Chay, de Philippe Starck au collectif Hall.Haus, en passant par Antoine Lesur, Maitrepierre, Florent Coirier, Leonard Kadid… Sans oublier un focus particulier sur les architectes d’intérieur.
Au programme également, du surf, de la moto… et même une nouvelle Cadillac dessinée par une jeune Française.
Une rentrée énergique, sous les bonnes vibrations de la Paris Design Week !
Rendez-vous incontournable dédié à la céramique, à l’architecture et à l’ameublement de salle de bains, le salon CERSAIE est de retour pour une 40e édition, organisée du 25 au 29 septembre à Bologne, en Italie.
Lancé en 1983, le CERSAIE est devenu, en quatre décennies, une référence mondiale pour les spécialistes du secteur. Avec 91 000 visiteurs recensés en 2022, le salon entend faire encore mieux pour cette édition anniversaire, avec un programme riche et plus de 600 marques internationales attendues pour présenter leurs nouveautés et ouvrir de nouveaux dialogues avec les professionnels.
Une traversée inédite de l’espace architectural : la Route 40
Le succès du CERSAIE est en grande partie dû au fait qu’il s’agisse d’un lieu où la créativité prend forme et où la capacité d’innover et d’anticiper le temps engendre des événements et des produits. Cette édition sera donc l’occasion d’un bilan des 40 années écoulées, traduit par une traversée spatio-temporelle intitulée Route 40. Le salon se transforme ainsi en un lieu multidisciplinaire et multiculturel où les surfaces et les produits de l’habitat idéal de demain sont imaginés et présentés. Les exposants de cette édition présenteront des produits qui sont la concrétisation d’une vision de l’architecture intégrée, dans une nouvelle conception synergique entre les espaces extérieurs et intérieurs.
Fil conducteur de cette édition, la Route 40 est un itinéraire d’exposition inédit, qui fait revivre au visiteur les moments marquants du salon, en se focalisant sur le design, la technologie, les produits et les différentes entreprises qui ont marqué son histoire. Organisée par Davide Vercelli et conçue par Dario Curatolo, la Route 40 sillonnera le salon, en partant du Portique à quatre arcades, pour continuer son chemin dans les galeries 21-22, 25-26, et jusque dans le mall du Pavillon 37, à travers des installations racontant chaque décennie. Un parcours qui démontre le rôle clé du CERSAIE pour proposer des produits de pointe et dans l’orientation du marché et de la conception, devenant au fil des années une plateforme culturelle en mesure d’informer tous les professionnels.
Avec une iconographie symbolique, le CERSAIE 2023 se développe autour de l’image d’un portail idéalement franchi par les visiteurs. Un passage qui permet de se projeter dans l’avenir et de s’immerger dans les nouvelles configurations de l’espace architectural et devient une intersection de connaissances, de visions et de matériaux. Cet itinéraire permettra aux différentes marques et souvenirs du passé de devenir les traces du futur. Celles-ci restitueront au secteur et au grand public le sens d’un voyage de quarante ans qui a permis à la céramique de sortir de l’étroitesse des espaces fonctionnels pour devenir un élément à part entière de l’espace architectural.
Un riche programme d’échanges et de rencontres
Le Cersaie 2023 sera une nouvelle fois l’occasion d’échanges riches, animés par plusieurs grandes expositions, par le Lectio Magistralis des 12 Prix Pritzker, du programme Bâtir, Habiter, Penser, par les conversations au Café de la presse ou encore par l’expérience sur le terrain réalisée dans les ateliers qui se dérouleront dans la Città della Posa. Aussi, l’association pour le design italien ADI, une nouvelle fois partenaire du salon, décernera deux prix : l’ADI Ceramics and Bathroom Design Award et l’ADI Booth Design Award, dont la remise de prix aura lieu le 27 septembre.
Le salon CERSAIE est promu par Confindustria Ceramica en collaboration avec BolognaFiere, organisé par Edi.Cer. SpA avec le soutien du Ministère des Affaires Etrangères et des Coopérations Internationales et de l’Agence Italienne du Commerce.
L’architecte d’intérieur Pauline Leprince présente à l’occasion de la Paris Design Week, sa première ligne d’objets, modulable à l’infini.
Pauline Leprince est une jeune architecte d’intérieur à l’origine de projets tels que L’Appartement Paris qu’elle crée en 2022, le Grand Parc qu’elle imagine avec le designer allemand Christian Haas ou encore le projet Café 48 livré en juillet dernier. Elle collabore également avec des designers et conceptualise des scénographies pour des projets nomades. Son travail va au-delà de la forme et de la fonctionnalité et est profondément ancrée dans le développement durable du design et de l’architecture.
Désireuse de repousser les limites dans son travail, elle à la recherche constante d’un mode de conception et de production durable. Appliquée, elle prête une grande attention aux détails et au choix des matériaux. Pour la Paris Design Week en septembre, elle présente sa première ligne d’objets intitulée 05-FP-23. Dans cette collection, chaque objet constitue une expérience, et donne corps à une communauté d’objets modulable à l’infini. La ligne comprend un ensemble table-assiettes-cup, un bureau, deux tables et 5 assises. A découvrir au 16 rue Béranger, Paris 3e.
C’est au sein du showroom Elitis que Batiik Studio présente sa première collection de mobilier, intitulée Dans le sillage de Nérée.
Batiik Studio est fondé en 2014 par Rebecca Benichou, qui s’associe ensuite à Florence Jallet en 2018. Ensemble, elles conçoivent et réalisent des intérieurs généreux et ambitieux. Le duo implique ses clients tout au long du processus créatif et compose des univers pleins d’imagination. Fortement influencées par leurs racines méditerranéennes, elles présentent à l’occasion de la Paris Design Week la collection Dans le sillage de Nérée, en référence au dieu de la mer et à sa descendance. Inspirées à la fois des coquillages et autres souvenirs de leur enfance passée près de la grande bleue, Batiik Studio dévoile une série de pièces de mobilier aux réminiscences estivales.
Une collection composée de quatre pièces : le miroir Néritès, la table Galatée, la banquette Calypso et la bibliothèque Agavé, en hommage aux rivages méditerranéens. A découvrir au showroom Elitis, 5 rue Saint-Benoît
75006 Paris.
À la Paris Design Week, du 7 au 11 septembre, Intramuros prend ses quartiers au cœur de la section Factory, pour un nouveau programme de talks à suivre depuis la mezzanine de l’Espace Commines.
Rendez-vous cette année pour un partage de points de vue et d’expériences, lors des échanges proposés par la rédaction, sur la mezzanine de l’Espace Commines (au 17 de la rue Commines). Voici le programme du lundi 11 septembre.
17h-18h
Production et écoresponsabilité : mutualiser les compétences
Si la recherche autour de la mise au point des matériaux à partir de matières locales ou d’éléments recyclés avance, le passage de l’expérimentation à une production en grand volume en industrie n’est pas sans difficulté. Partage d’expériences pour accompagner ces phases de transition, avec des acteurs qui s’engagent, quitte à mutualiser leurs outils et leurs compétences.
Intervenants
- Julien Diard, directeur général de Moore Design
- Stéphane Joyeux, designer, directeur artistique de Roger Pradier
À la Paris Design Week, du 7 au 11 septembre, Intramuros prend ses quartiers au cœur de la section Factory, pour un nouveau programme de talks à suivre depuis la mezzanine de l’Espace Commines.
Rendez-vous cette année pour un partage de points de vue et d’expériences, lors des échanges proposés par la rédaction, sur la mezzanine de l’Espace Commines (au 17 de la rue Commines). Voici le programme du dimanche 10 septembre.
15h-16h
Les nouveaux territoires du graphisme
Outil de lien social, pour une reconnexion à l’espace public comme à une histoire commune, et de partage de langages, le design graphique intervient dans des projets très variés et des champs de recherche très larges.
Intervenants
- Eddy Terki, designer graphique, Espace public
- Vanina Pinter, historienne et commissaire de l’exposition « Parade » au Signe, à Chaumont
- Silvia Dore, designeuse graphiste à Stéreo Buro et présidente de l’AFD
16h-17h
Design et mondes immersifs
Web 3, NFT : dans la foulée des artistes, les designers investissent l’espace virtuel pour des installations, des performances, des prototypages de projets, des extensions de l’univers de marques, voire des produits augmentés… Quand les artistes n’hésitent pas à faire le chemin inverse. Décryptage prospectif d’acteurs du domaine.
Intervenants
- Alessio Scalabrini et Ariel Claudet, designers à Deverse Studio
- Anthony Authié, designer à Studio Zyva
- Gilles Alvarez, directeur artistique de la Biennale internationale d’arts numériques Nemo
À la Paris Design Week, du 7 au 11 septembre, Intramuros prend ses quartiers au cœur de la section Factory, pour un nouveau programme de talks à suivre depuis la mezzanine de l’Espace Commines.
Rendez-vous cette année pour un partage de points de vue et d’expériences, lors des échanges proposés par la rédaction, sur la mezzanine de l’Espace Commines (au 17 de la rue Commines). Voici le programme du samedi 9 septembre.
15h-16h
Design culinaire, un secteur d’avenir ?
Qu’est-ce que le design culinaire ? Entre nouveau champ créatif et territoire d’expérimentation, comment les écoles se sont-elles emparées de ce secteur ? Que traduit le design de notre rapport à l’alimentation, de nos usages, de notre culture ? Comment le design intervient-il dans une gestion plus responsable de nos déchets alimentaires ?
Intervenants
- Julia Kunkel, directrice de Food Design Lab, École de design Nantes Atlantique
- Marc Brétillot, designer culinaire, IDE (en visio)
- Germain Bourré, fondateur de Germ-Studio
16h-17h
Le design par nature
Si la question de la préservation de l’environnement est aujourd’hui cruciale, le monde vivant dans son ensemble, à toutes ses échelles, est un terrain d’inspiration et de solution pour les designers.
Intervenants
- Gavin Munro, biodesigner
- Guillian Graves, designer, fondateur de Big Bang Project
- Benjamin Graindorge, designer, enseignant à l’Esadse
17h-18h
Transdisciplinarités : nouveaux lieux, nouveaux modèles ?
Pop-up stores, résidences, expositions, formations et incubateurs… De nouveaux lieux multiprogrammes se développent. Une façon de redynamiser des quartiers par un ancrage de créateurs tout en favorisant la mutualisation de moyens et le développement de réseaux.
Intervenants
- Maeva Bessis, directrice générale de La Caserne
- Nicolas Bard, cofondateur du réseau Make Ici
- Claire Hazart, directrice du Jardin des arts et du design
18h-19h
Le rôle des designers dans l’élaboration de l’avenir d’ALULA
Cette table ronde met en lumière les différentes initiatives d’Alula, du domaine public aux résidences. Les intervenants partageront leurs expériences avec Alula Design Award, les projets de la Design Gallery, et la résidence design à venir. Rencontre modérée par Cyril Zammit, conseiller en design et consultant, membre du Jury Alula Design Award.
Intervenants
- Ahmed Al Mannai, associé, Shepherd Studio/Partner, Shepherd Studio
- AlJoharah Al Rasheed, associé et directeur de la Création, Teeb/ partner and Head of Design tech
- Hamad Homiedan, responsable de l’Académie et de l’enrichissement artistique, The Royal Commission for Alula
- Samer Yamani, fondateur & créateur, creative Dialogue
Table ronde en anglais / Panel discussion in english
Pendant la Paris Design Week, Gaggenau accueille au sein de son showroom l’exposition FUSION.S, en partenariat avec la Faïencerie de Charolles.
Au sein de son nouveau showroom situé dans le quartier Saint-Germain, Gaggenau invite ainsi les architectes, le grand public et amateurs de design à découvrir un lieu inspirant, mettant en scène les appareils de la marque dans une architecture imaginée par le studio allemand 1zu33. Tournée vers le partage, la marque propose toute l’année une programmation variée en lien avec les événements dédiés au design et à l’architecture d’intérieur. Pour la Paris Design Week du 7 au 16 septembre, Gaggenau accueille les créations de la Faïencerie de Charolles à travers l’expsoiton FUSION.S qui met en valeur la rencontre de deux savoir-faire d’exception issus des «métiers du feu» et de la cuisson. Des techniques basées sur les changements d’états et de la matière, de la forge au travail du métal, aux techniques de l’émaillage et de la céramique.
Une ode à la couleur
Pour cette exposition, les pièces choisies par le studio FdC contrastent avec le design discret et travaillé des appareils électroménagers de la marque et l’architecture du showroom. Ainsi, les racines historiques des deux marques s’entrelacent tout en valorisant leur modernité. À travers les créations de sa nouvelle collection “Minéral Fantastic”, la Faïencerie de Charolles fait une ode à la couleur vibrante et contemporaine. Imaginée comme un voyage, la collection est née d’une réflexion sur la minéralité de la Faïence, matériau au coeur du savoir-faire de la marque. Fabriquée à la main en Bourgogne, cette sélection met l’accent sur des pièces aux volumes aériens aux formes XXL et un gros travail de la couleur.
Les Grands Prix de la création la ville de Paris fêtent leur 30 ans en septembre. La rétrospective des lauréats primés donne une lecture passionnante de l’écosystème de la création parisienne, et surtout témoigne des changements forts de paradigme dans ce secteur. Deux expositions sont d’ailleurs à voir pendant la Paris Design Week : à l’Hôtel de ville et à la Galerie Joseph. Partage d’expériences avec Laurianne Duriez, cheffe du Bureau du Design, de la Mode et des Métiers d’Art et directrice des Ateliers de Paris.
Entre lieux dédiés, accompagnements, Grands Prix… pourquoi la création est une filière aussi stratégique à Paris ?
Au départ centrés sur les arts, les Grands Prix ont intégré la mode, les métiers d’art et le design, marquant le début d’une politique de soutien à la création à Paris. C’était valoriser l’extrême dynamisme de cette filière par la mixité d’acteurs sur ces métiers de la création. Sur un même territoire, on en a un nombre d’écoles incroyables sur la mode, le design et les métiers d’art, un nombre d’ateliers, d’entreprises, d’agences de marques qui n’a cessé de développer et de se renouveler. Si l’on prend le prisme de la mode, les créateurs du monde entier s’inscrivent pour défiler pendant les fashion weeks, c’est le lieu où il faut être visible : Paris reste la capitale de la mode. Et c’est possible grâce à la présence d’ateliers de savoir-faire, d’agences de design… On n’analyse jamais assez combien ces écosystèmes s’enrichissent entre eux, s’imbriquent, sans parler de la richesse de la programmation culturelle et de l’ensemble des événements. Les créateurs sont dans un environnement qui leur permet de se nourrir d’une multiplicité d’expressions.
Comment les designers se positionnent dans cet écosystème, justement ?
Observer l’évolution des profils des lauréats des Grands Prix est intéressant ; on remarque bien sûr des périodes fortement en résonance avec les arts décoratifs, tournées sur de la création industrielle, avec des personnalités devenues des grands noms connus à l’international. On a vu apparaître cette appétence pour l’artisanat, alors qu’il y a quelques années le design s’en emparait peu. A l’image de François Azambourg – lauréat des grands prix en 2004 – qui a marqué ce virage. Pour certains, le secteur artisanal permet une discussion et une gestion plus globale de leur projet, parfois difficile à mener dans le monde industriel. Et l’envie de trouver de nouveaux modes de production, qui reconnaisse davantage le temps de la conception pour la rémunération.
Plus récemment des profils très différents ont émergé, très soucieux d’inscrire leur projet dans un contexte réfléchi et de maîtriser l’ensemble du process. Ce sont des designers attachés à la ressource des territoires, qui sortent de Paris pour découvrir des savoir-faire. C’est une génération plus engagée, consciente, qui réfléchit à son impact. Elle veut produire des choses qui ont du sens et qui soient en lien avec une histoire et un territoire, elle veut compter dans l’histoire de l’entreprise, agir sur son développement, voire agir sur un savoir-faire ou des techniques pour qu’elles perdurent.
Parmi ces designers engagés, certains sont véritablement des chercheurs ?
Oui, ils veulent répondre à des enjeux environnementaux et sociétaux, en apportant une réponse. A l’image de Samuel Tomatis, lauréat en 2021 ou d’Anna Saint-Pierre lauréate en 2022, qui cherche à valoriser une ressource pour en faire un matériau : l’algue pour Samuel Tomatis, les déchets du bâtiment pour Anne. Et c’est essentiel de les soutenir car il y a très peu d’aides financières pour accompagner ses projets. Il manque vraiment des dispositifs pour accompagner le design d’innovation, l’expérimentation, et le développement économique, car les concours ne sont pas suffisants pour monter un projet. Ces designers sont souvent seuls, en indépendants, ils ont besoin d’avoir une équipe, de payer des prototypes, de travailler en laboratoire pour tester les caractéristiques : le travail de création de matière demande des enveloppes pour payer des prestations de service et des tests, et les premières années les banques vont difficilement les suivre pour des prêts. Ce sont des projets compliqués où il y a tout à faire, où il faut convaincre des industriels, des filières, voire créer la filière quand il s’agit de récupération de déchets. Les finances sont un vrai frein, et pourtant le design a à jouer un rôle dans ce secteur-là.
Les grands prix révèlent-ils ces prises de risques ?
Oui, le recours au concours pour certains est une question de survie, pour d’autres cela permet d’avoir la reconnaissance pour avoir des investissements, rassurer des clients. Cela leur donne une assise pour leur activité. La bourse est un coup de pouce financier qui leur sert à embaucher, financer une prochaine collection dans la mode, s’installer dans un atelier, acheter du matériel, aller à un événement… et évite un prêt.
Mais les Grands Prix révèlent aussi les grandes tendances : depuis six ans, il y a une vraie révolution, l’ensemble des projets ont un engagement pour apporter des réponses et faire que l’on vive dans un monde plus vivable. Cela va de l’innovation sociale jusqu’à la gestion des déchets, les questions de genre et d’inclusivité. Dans la mode comme dans le design, on retrouve des projets engagés. Des créateurs de mode comme Maitrepierre (lauréat 2021) ou Victor Weinsanto (lauréat 2022) cassent les codes et prennent la parole sur ces sujets de société. Dans la mode, que des projets de modes responsables. On veut produire à la demande, localement, prise de risques. On change le modèle je sors une collection, je fais un stock, et c’est tout un changement organisationnel. Que leurs créations apportent des réponses.
A côté des Grands Prix, l’incubateur est aussi un soutien important ?
Nous avons un plan d’action complémentaire : notre structure qui accompagne tous les types de projets, en faisant constamment évoluer notre offre. L’incubateur nous a permis d’être visible pour faire grandir cet écosystème parisien : la famille des résidents, les lauréats des Grands Prix, tous les lieux dédiés (Villa du Lavoir, cité Taillandier, Caserne des Minimes…)
Ces lieux dédiés sont essentiels pour maintenir les créateurs sur le territoire au regard du prix du marché ; la mixité de professionnels permet la création de ces écosystèmes qui entre eux grandissent : un graphiste va travailler avec une marque de mode, un designer entraider un artisan. Ils ne sont pas seuls, et c’est ce que je présente aux délégations.
Ce dispositif d’incubation a été pionnier il y a plus de 15 ans ?
C’est effectivement le premier incubateur mondial qui rassemble ces trois secteurs, on a servi de modèles pour des incubateurs à New York, Londres, Amsterdam… Mais notre accompagnement ne se limite pas aux résidents, il existe une offre dédiée à tous les professionnels du territoire avec des cycles de formation dont certaines sont gratuites. Et dans cet écosystème de la création, à côté des Grands Prix, existent d’autres actions de visibilité et de rayonnement comme le label Fabriqué à Paris, les actions à l’international…
Quels sont les projets à venir ?
Deux nouveaux lieux vont être crées dans les prochaines années avec plus d‘interdisciplinarité, avec des ingénieurs, des paysagistes, des architectes, pour aller plus loin dans la mixité. Pour davantage rendre visible les designers qui travaillent pour le public, pour les collectivités les territoires, on va lancer avec la Ville de Paris une action sur le design d’actions publiques où l’on va faire travailler des écoles parisiennes de design en lien avec les directions de la ville de Paris pour faire remonter des problématiques. Notamment avec l’ENSCI-Les Ateliers et Master design d’action publique de Sciences-Po.
Les rendez-vous de la Paris Design Week
A l’occasion de la Paris Design Week et des Journées européennes du Patrimoine, les Grands Prix de la création proposent deux expositions dédiées. Du 7 au 17 septembre d’abord, durant la Paris Design Week, GOODMOODS présentera (RÉ)CRÉATION, une exposition imaginée pour la Ville de Paris célébrant les trente ans des Grands Prix de la Création. Dévoilée au sein de la Galerie Joseph rue Payenne, l’installation honorera trois décennies de design français avec un regard enjoué et engagé. Les pièces des lauréats, sélectionnées pour leurs jeux de couleurs optimistes et leurs traits fantaisistes, dialogueront au cœur d’un décor aux airs de cour d’école. À découvrir 5 rue Payenne, 75003 Paris.
Depuis 30 ans, les Grands Prix de la Création de la Ville de Paris récompensent les talents du Design, de la Mode et des Métiers d’Art. Afin de célébrer cet anniversaire, une exposition retrospective propose de (re)découvrir leurs approches prospectives et créatives. Exposition sur inscription, 3 rue Lobau, 75004 Paris.
À la Paris Design Week, du 7 au 11 septembre, Intramuros prend ses quartiers au cœur de la section Factory, pour un nouveau programme de talks à suivre depuis la mezzanine de l’Espace Commines.
Rendez-vous cette année pour un partage de points de vue et d’expériences, lors des échanges proposés par la rédaction, sur la mezzanine de l’Espace Commines (au 17 de la rue Commines). Voici le programme du vendredi 8 septembre.
16h –17h
Les designers digital native dans ce monde connecté
Par l’expertise du digital native designer permet de créer des designs esthétiques, fonctionnels, répondant aux besoins de cette société connectée. Ils s’adaptent aux nouvelles tendances afin d’être compétitifs. Aujourd’hui notre interconnectivité crée un écosystème intelligent et impacte la façon dont nous interagissons avec le monde qui nous entoure.
Intervenants
- Frédéric Lintz, designer associé et cofondateur Eliumstudio
- Jaël Petit-Fournier, directeur artistique et enseignant, ESDAC
17h-18h
Le sport, vers un nouveau mode de vie ?
Par la force des valeurs partagées et le transfert d’innovations techniques, le sport a pris une place grandissante dans notre vie quotidienne, influençant nos modèles de mobilité, notre façon de se vêtir… Et il se révèle un puissant levier de nos imaginaires collectifs. Fabrication, innovation, stratégie prospective : quel rôle le design doit-il jouer, de l’accompagnement d’une pratique vers l’émergence de nouveaux usages ?
Intervenants
- Kerensa Neale, directrice artistique de Decathlon
- Jean-Louis Fréchin, designer, fondateur de NoDesign
- Desolina Suter, directrice artistique de Première Vision, le textile au service du sport
18h-19h
Le design, vecteur de développement des territoires
En résumé : quelles plus-values économiques et culturelles le design peut-il apporter sur un territoire, en termes de dynamisme, de nouveaux marchés, de mise en valeur de savoir-faire, de fédération d’acteurs ?
Intervenants
- Emmanuel Thouan, directeur de DiCI et de l’APCI/France Design Week
- Anne Racine, directrice de la Villa Carmignac, cofondatrice du réseau Plein Sud
- Caroline Naphegyi, fondatrice de Design for Change, membre de Mondes Nouveaux, directrice des études à l’École Camondo
- Thomas Merlin, designer, et Bertrand Vignau-Lous, cofondateur de l’agence Entreautre