Disparition de Virgil Abloh, créateur engagé
Louis Vuitton annonçait ce dimanche la disparition de Virgil Abloh, directeur artistique depuis 2018, emporté par un cancer à l’âge de 41 ans. Ce grand créateur bousculait les codes du luxe, qu’il voulait plus inclusif, engagé dans l’affirmation des cultures afro-américaines et la diversité. Dans une fusion des styles, il multipliait les propositions entre mode, art contemporain et design.
Avec sa trajectoire fulgurante, Virgil Abloh marquera son époque et surtout en inspirera plus d’un. À 22 ans, ce natif de l’Illinois fait son entrée dans le monde de la mode en devenant le styliste du rappeur Kanye West. Quelques années plus tard, il intègre la marque luxe italienne Fendi, et met un pied indirect dans le groupe LVMH. En 2013, il fonde Off-White, sa première marque de vêtements. Sa signature créatrice ? Apporter l’énergie de la rue, importer le streetwear dans le haut de gamme, en s’appuyant sur un graphisme fort. Le styliste va gagner différents prix prisés dans le milieu de la mode, et surtout séduire la maison Louis Vuitton qui le nomme directeur artistique en 2018. L’objectif est clair : séduire les milleniums, répondre à une jeunesse qui demande des gages d’inclusion. Pour la presse, il prendra très vite un surnom de « l’empereur du cool ».
Un créateur multidisciplinaire
Formé à l’origine en architecture et génie civil, le créateur aime la pluridisciplinarité : En 2019 le musée d’art contemporain de Chicago lui consacrait une retrospective baptisée « Figures of Speech » : on y retrouve notamment des pièces de sa première exposition solo « Pay per View », avec notamment ses détournements de panneaux publicitaires de grands groupes. De Chicago à Londres ou Tokyo, ses œuvres largement inspirées de la contre-culture sont exposées de par le monde. Et plus récemment à Paris : en 2020 la galerie Kreo présentait« Efflorescence », parmi ses dernières séries : un savant travail de la matière, le béton, tagué et graffité, et un miroir ajouré à la streetwear.
Musique, stylisme, art contemporain… l’artiste ajoute aussi la corde du design à son arc. Et dans une vision très panoramique. S’il a collaboré avec Nike, on repère ses collaborations capsules avec IKEA, dans la stratégie de la marque suédoise de rechercher des « signatures » pour ses collections tout en gardant des « prix serrés » : la collection Markerad, conçue pour les petits espaces, partira en un temps record. Baccarat, Levi’s, Vitra… les collaborations sont très diverses : il sera aussi conseiller de la marque Evian. Braun fera aussi appel à lui pour fêter ses 100 ans : 60 ans après la création du Wandanlage en 1961 par Dieter Rams, il s’empare, à sa manière de l’emblématique chaîne hifi exposée sur un mur, l’un des grands produits du design, selon l’artiste. Dans une finition chromée, le dispositif sonore évolue vers l’Art fonctionnel. « Les objets ordinaires peuvent avoir une qualité artistique si on les regarde vraiment. »
S’il a été controversé – jusqu’à parfois être accusé de plagiat –, il aura été surtout inspirant, avec une lecture ravigorante de l’époque contemporaine, faisant s’entrechoquer des énergies contraires, portant les cultures urbaines dans les plus hautes sphères.