Web 3
Quoique évoluant dans les espaces virtuels, l’artiste et designer Charlotte Taylor procède d’une approche créative particulière. Alors qu’elle travaille elle-même en « analogique », avec crayons et papiers, elle s’entoure d’artistes 3D pour l’aider à peaufiner des projets épousant les nouveaux contours technologiques des intérieurs immersifs qu’elle signe.
« Mes projets sont toujours issus d’un aller-retour entre réel et virtuel », reconnaît-elle. « Cela cadre bien avec ma façon de travailler, à distance, avec une communication purement visuelle et riche en diagrammes ». Les rendus de ses espaces rêveurs – d’où leur nom de dreamscapes – sont particulièrement guidés par la texture de ses images, donnant à la fois un côté très sensible et réaliste à ses intérieurs, en grande partie grâce à la lumière qui s’y exprime. « La lumière est pour moi l’élément clé d’un espace », revendique-t-elle. « Jouer avec une lumière naturelle et chaude donne une impression familière et moins austère aux intérieurs ».
Mais là encore, c’est la référence à des détails très concrets qui caractérise l’essence très vivante de ses créations. « J’utilise toujours des petits détails visuels empruntés au monde réel pour sublimer d’un trait de réalisme des espaces totalement virtuels, mais surtout je traite véritablement mes projets numériques comme s’ils étaient de vrais projets physiques. Dans les projets réels, ce sont souvent les contraintes des clients, d’ingéniérie ou d’autres facteurs liés à l’environnement immédiat qui font varier les projets depuis l’intention initiale. Bien sûr, dans un projet virtuel, l’impossible devient possible. Mais j’aime garder à l’esprit ces petites contraintes qui créent toutes les incidences des intérieurs, comme la disposition des prises, des commutateurs et autres éléments domestiques. »
Maison de sable
Plusieurs de ses projets d’architecture d’intérieur emblématiques ont été conçus avec le designer 3D Stefano Giacomello, comme Casa La Paz ou Sand House (qui a donné le nom de son agence, Maison de Sable). « Sand House est né d’une vision augmentée des châteaux de sable de notre enfance, améliorés en quelques chose de vivable en termes d’échelle », explique Charlotte Taylor. « Dans Casa La Paz et Sand House, comme dans beaucoup de mes premiers travaux, l’espace a été ébauché à partir d’un simple cadrage d’image alors que désormais je travaille d’une façon plus traditionnelle à partir d’un plan mis en perspective, mais cela reste une démarche inspirante. Dans ces travaux, le mobilier est directement lié aux formes de l’architecture. L’idée est vraiment de coller aux formes douces, incurvées et organiques de l’architecture pour créer une conversation homogène entre le mobilier et l’espace. »
Une autre de ses collaborations récurrentes est avec le créateur 3D et designer d’intérieur français Anthony Authié (Villa Ortizet, Neo-Chemosphere, collection de NFTs pour Architoys). « Je collabore avec Anthony depuis très longtemps. Son Zyva Studio a un style visuel totalement unique et nos collaborations sont toujours l’occasion de fusionner nos deux univers ». Entre l’excentricité naturelle, riche en identifiants couleur d’Anthony Authié, et les textures plus fluides et lumineuses de Charlotte Taylor, le courant passe à l’évidence. « Nos projets architecturaux comme Villa Ortizet ou Neo-Chemosphere procèdent toujours d’un désir commun d’explorer et de révéler des choses qu’on ne voit pas. Pour Neo-Chemosphere, nous avons repris la structure externe du bâtiment construit par John Lautner, pour façonner son design intérieur, qui est d’ailleurs toujours susceptible de se compléter d’autres éléments. C’est ce qui est passionnant avec le médium numérique : rien n’est jamais totalement fixé. D’autres parties non visibles peuvent toujours surgir. »
Renaissance est une agence d’un genre nouveau, qui se positionne dans l’accompagnement des artistes et des marques désireuses de pénétrer l’univers du web3 pour qu’elles puissent à la fois comprendre ce nouvel environnement complexe et mettre en place les dispositifs créatifs et stratégiques dans ce domaine.
« Notre idée est de créer des expériences immersives qui rendent intelligibles la complexité du web 3 et qui permettent de mettre en valeur ce principe de rareté digitale induit par les NFTs », explique Adrien Ohannessian, l’un de ses trois fondateurs. Il poursuit : « Avec le WEB 3 et l’apparition des NFTs, nous avons vraiment eu l’impression d’une révolution technologique favorable aux artistes. C’est ça qui nous a donné envie de nous lancer. » En effet, avec les smart contracts – la preuve formelle d’authenticité qui se trouve dans l’œuvre elle-même, et qui intègre le créateur de l’œuvre, tout comme son acquéreur de façon inaliénable – mais aussi grâce au principe de décentralisation de la blockchain, l’artiste n’est plus dépendant d’un tiers comme les grosses structures du réseau social pour affirmer ses droits sur son œuvre et recréer un principe d’échange communautaire dont il reste maître. « Cela fait 15 ans que tout est gratuit sur internet, financé par la publicité et ça ne choque personne. Désormais, on peut parler de souveraineté de la data à l’ère digitale. »
Pour soutenir cette créativité émergente, Renaissance a cofondé la NFT Gallery, une galerie d’art digital créée avec une centaine d’entrepreneurs français, située juste en face de Beaubourg, qui se veut un lieu d’éducation pour comprendre ce nouvel écosystème (pour par exemple se familiariser avec les airdrops, ces fameux lancements promotionnels de jetons promotionnels NFTs à destination de la communauté d’usagers), ou voir des expositions (comme X-Hack, en hommage à artiste de la scène du crypto-art comme XCopy).
La dynamique est réelle en ce moment avec la mise en place de nombreuses plateformes de vente d’œuvres ou de curation, mais aussi un intérêt de l’institution muséale, avec le lancement de collections de NFTs au Centre Pompidou, qui choisit même de les faire sortir de l’écran en imprimant les formes abstraites d’Autoglyphs, du duo de créateurs Larva Labs, sur les murs du musée.
Une agence intermédiaire entre créateurs 3D et marques
Bénéficiant de cette expérience et de cette dynamique, Renaissance peut ainsi recommander des artistes à des marques, comme le studio 3D Plus Mûrs à Renault, voire épouser elle-même un positionnement artistique (comme cela a été le cas avec la designer d’intérieur Laura Gonzalez, spécialiste du mix and match, dans le cadre de D3sign capsule). Dans tous les cas, l’agence développe une relation privilégiée avec des artistes particulièrement porté par ce nouvel esprit libertaire offert par les NFTs, comme le DJ techno Agoria qui retrouve dans ce nouvel environnement des éléments de comparaison avec le côté underground de la scène électronique des débuts (le duo Larva Labs a d’ailleurs lancé une collection de NFTs à succès baptisée CryptoPunks). Du côté des marques, Renaissance apporte l’avantage d’une expertise et un savoir-faire concret bâti sur ce rapport spécifique avec les artistes numériques/3D liés à ce nouvel environnement web 3. Pour Dom Perignon, Renaissance a créé une expérience 3D online pour vendre 200 bouteilles de champagne virtuelles, donnant chacune accès à une bouteille bien réelle, en amont de sa collection « physique » avec Lady Gaga.
Pour célébrer le cinquantième anniversaire de la R5 (1972-2022) et faire entrer le groupe Renault dans le WEB 3, Renaissance a conçu 1972 nouveaux designs à partir des quatre modèles physiques (R5, R5TL, R5Turbo, et Carvan), et les a diffusés comme des pièces uniques en NFTs, « un peu comme une nouvelle génération de véhicules Renault, mais avec plein de variations de couleurs et de textures ». Pour Evian qui voulait célébrer sa collaboration avec l’artiste Sara Shakeel, connu pour ses travaux de collages à effets paillettes sur des photographies et objets en 3D, Renaissance a lancé une collection de NFTs via le marché Tezos, une blockchain green. L’ensemble des revenus a ensuite été reversé pour financer le programme digital Young Talent Fund du nouveau musée 3D de Somerset House.