Travail
Créé en 2012, MOORE Design fait l’acquisition de CEB (Comptoir Européen du Bureau) et renforce le développement de son activité de création et distribution de mobilier pour les espaces tertiaires et le secteur hôtelier.
Passionné par le mobilier et le design, Charles Guez a fondé CEB en 1989 et l’a développé grâce à son expertise solide, une sélection affutée de produits et une politique de services de qualité.
Positionné comme acteur de l’aménagement d’espaces de travail et hôtelier, Julien Diard, fondateur de MOORE Design, a la volonté de conserver la marque CEB, les équipes et le showroom, l’objectif est de renforcer les passerelles entre les deux sociétés : « Malgré l’époque, nous vivons une période extraordinaire quant à la transformation des espaces de travail dans le monde tertiaire. Nous pensons qu’en nous unissant nous allons accompagner nos clients au plus proche de leurs besoins, tant au niveau national, qu’international (avec notamment l’ouverture fin 2020 d’un showroom à Bruxelles). »
D’autre part, aux regard de la situation, Julien Diard précise que « le marché annonce un retrait des ventes compris entre 30% et 40%. MOORE Design vient de clôturer (au 30 juin 2020) son 8e exercice avec un chiffre d’affaire en hausse de 5% par rapport à l’année dernière incluant la période de confinement. Avec la signature de nombreux référencements et l’ouverture à l’international, MOORE est confiant. »
Pour Charles Guez, « le marché a subi une accalmie, mais dès la reprise, les projets en cours ont été majoritairement maintenus. L’accompagnement des entreprises dans ces nouveaux modes de travail agiles vont être le plus important challenge et sera créateur de nouvelles opportunités pour MOORE Design et CEB. »
MOORE Design est aussi partenaire du concours lancé par Intramuros et l’école CAMONDO.
Sociologue, spécialisé dans l’analyse des imaginaires et la transformation du lien social, Stéphane Hugon est également enseignant à l’ENSCI et Invited Professor à la ECA de l’Universidade do SãoPaulo. Il y a15 ans, il a cofondé le cabinet Eranos, qui accompagne les entreprises à « à se réconcilier avec la société » et qui a également un bureau en Corée. Au moment où l’on commence à scénariser l’étape post-confinement, quels sont les enjeux majeurs de ce « monde d’après » ? Comment même penser la question du lien social en ces temps où est paradoxalement prônée la distanciation sociale ? Le sociologue propose un premier éclairage à chaud.
Pour Stéphane Hugon, au XXIe siècle, « nos vies ont progressivement radicalement changé », l’explosion du web et la démultiplication des outils numériques, la question climatique, la prise en compte de l’environnement, se sont installés dans nos vies, dans un processus de mutations continuelles et collatérales plus que de ruptures ou de révolutions. De nouvelles formes de rapport au travail sont apparues, de nouvelles formes de sociabilités se sont développées. Et ce sont ces changements qui se révèlent brutalement dans la crise mondiale liée au Covid-19, de par le confinement généralisé. : « la réflexion est essentielle sur la manière dont s’est déporté – et de manière aussi rapide – le travail hors les murs de l’entreprise. Selon une étude récente de l’Insee, un tiers des salariés en télétravail – qui avaient déjà partiellement cette pratique– a mis en place une forme de dynamique d’artisanat tertiaire, avec une efficacité importante.Un tiers s’en sort plutôt bien, et développe une nouvelle culture du travail, dans une logique de transformation par l’usage, avec des process d’ajustement essais/ erreurs, dans cette culture émergente du “ faire ”. Un tiers est désemparé, n’arrive pas à travailler hors les murs. »
Comment envisager le retour en entreprise ?
Au départ, derrière le télétravail, le sociologue note une culture plutôt élitiste, où l’on accepte une certaine proximité, voire porosité, entre la sphère domestique et professionnelle. Il est cependant intéressant de noter combien le confinement développe une certaine forme de mise en scène par sa gestion de son fond d’image par webcam (fond flouté, ajout de décor…) par des outils qui apparaissaient comme des gadgets hier, et qui marquent dès lors une zone d’intimité, une frontière de partage, de délimitation de sa sphère privée.
Pour Stéphane Hugon, « l’expérience du confinement va venir nécessairement requalifier les méthodes, voire reconfigurer les circuits de travail. Par exemple, on ne pourra plus parler de la même manière à ses salariés, le phénomène ayant été vécu de façon extrêmement contradictoire. » Entre le vécu du confinement qu’on soit en appartement ou en maison avec piscine, le vécu de l’épidémie, entre les personnes touchées, les proches décédés, « il y a un grand écart dans le vécu des populations ». Et dans les entreprises, « il y a un langage commun à retrouver, un imaginaire commun à reconstruire. Et cela va être complexe, surtout dans les grands groupes où jusqu’alors, la stratégie reposait sur le lissage des expériences. Il va falloir redistribuer de la confiance, refaire une forme collective du travail. Les divergences apparaissent quand les mêmes mots ne disent plus les mêmes choses. Il y a un risque d’éclatement qui rend nécessaire de repenser les expériences relationnelles. »
Pour le sociologue‚ dans les temps qui suivent des fortes crises, comme les périodes d’après-guerre, « on a besoin de retrouver une éthique commune, de resynchroniser la société. » C’est par exemple le choix du Général de Gaulle qui crée le ministère de la Culture et missionne André Malraux sur la réconciliation nationale, avec un retour à des textes fondateurs. Cette période de Covid est source de confusion dans les représentations : « On assiste à un retour du collectif depuis 25ans alors que la culture occidentale était plus propice à valoriser l’individu.Les mesures de distanciation sociale viennent heurter ce retour à la convivialité. Cela fait des années que l’on travaille à ouvrir les espaces, à penser la circulation des lieux, que l’on voit se décliner les concepts de tables ouvertes, de coworking… comme une ironie du sort, va-t-on revivre un retour à l’hygiaphone ? » Il est nécessaire de repenser dans l’urgence la structuration des lieux mais, dans cette urgence, de penser parallèlement à des modularités pérennes, et à notre rapport à l’espace, en tenant compte des éclairages apportés par les analyses proxémiques. Alors comment se réinventer ? Pour Stéphane Hugon, l’essentiel se joue autour du lien social : « Les contraintes liées au virus nous obligent à réinventer du lien. La vie sociale, c’est ce qui réactive les imaginaires, requalifie les espaces. Et cela crée de nouveaux seuils, de nouveaux gestes, cela vient séquencer des actes comportementaux Cela repositionne les raisons d’être des entreprises, en interne et en externe. » Et cela interroge l’espace social dans son ensemble : « quelles sont les formes, les interfaces qui nous permettent de le créer ? » Pour lui, le véritable enjeu est « comment retrouver le moyen d’être ensemble ? » Et par son approche formelle, le design est important « pour de penser cette forme relationnelle nécessaire à la construction d’une harmonie relationnelle. »