Le Portugal, terre fertile du design
Collection Freya © Nosse Ceramics / Collection Reform © Wewood / Collection Fiore © Zagas

Le Portugal, terre fertile du design

Depuis quelques années, le design portugais a le vent en poupe. Avec un chiffre d’affaires à l’export avoisinant les 4 milliards d’euros en 2021 (source : aicep Portugal Global), les entreprises portugaises dans le secteur du design et de la création sont de plus en plus nombreuses à s’implanter sur le marché européen et international. Un succès probablement dû à leur savoir-faire en matière de matériaux et à un attrait pour l’artisanat qui leur est propre. Quelles sont les sociétés fleurissantes du secteur, leurs enjeux, leurs spécificités ? Tour d’horizon de cette industrie portugaise à suivre de près. 

Collectif GirGir : célébrer la beauté des déchets

« Nous pensons que chaque matériau a une histoire à raconter et nous nous efforçons de préserver ce caractère unique dans nos pièces. » Voici le mantra du collectif GirGir, fondé par les designers Ana Rita Pires, André Teoman et Filipe Meira. Toutes les pièces sont conçues à partir de matériaux en fin de vie, initialement destinés à devenir des déchets oubliés. Ces créations sont une célébration à la beauté de la réutilisation, en alliant l’esthétique à la fonction, en promouvant par la même occasion la culture de la durabilité des matériaux. Leur première collection, Honey, est réalisée en partenariat avec une usine dans le nord du Portugal qui produit des dalles de marbre en nid d’abeilles pour des projets de luxe. Une collection singulière, offrant un contraste entre l’aspect luxueux du marbre et le côté industriel du métal texturé. Chaque pièce dépendant des restes disponibles, celles-ci sont ainsi toutes uniques.

Table basse Travertino © Collectif GirGir

Laskasas, l’art du fait-main personnalisable 

Fondée en 2004 à Porto, Laskasas est une marque spécialisée dans la création artisanale de mobilier, de tissus d’ameublement et de pièces métalliques, pour des projets résidentiels et commerciaux. Depuis près de vingt ans, l’entreprise a mis la personnalisation au cœur de ses ambitions. Fabriqués à la main par une équipe d’artisans dans leur usine du nord du Portugal, les modèles proposés sont tous disponibles dans des matériaux, finitions et tailles personnalisables. Une configuration rendue possible grâce à une équipe spécialisée qui accompagne les clients tout au long du processus de personnalisation. Parmi ses pièces iconiques, on peut citer le fauteuil Ambrose, la table Kelly, la chaise Dale, le canapé Fletcher, le lit Brooke ou encore la lampe Jones. En 2023, la marque était présente à Maison&Objet, à la London Design Week, au Salone del Mobile, à l’ICFF et à Decorex, confirmant son positionnement sur la scène design internationale.

© Laskasas

Wewood, bois et tradition 

L’histoire de Wewood est d’abord celle de deux frères menuisiers qui fondent, en 1964, la société Móveis Carlos Alfredo, spécialisée dans la fabrication et l’exportation de meubles en bois massif. À partir de 2012, l’entreprise est rebaptisée Wewood-Portuguese Joinery, en prenant compte de son héritage et en proposant des produits dont la création est axée sur la qualité des matériaux, la construction durable et le design intemporel. Toutes les pièces sont fabriquées en petites séries afin de maintenir un savoir-faire traditionnel de haute qualité et dont l’esthétique reflète la culture et le design portugais. En septembre dernier, Wewood dévoilait deux nouveautés : la collection de tables basses et d’appoint Re-form, imaginée par Alain Gilles, ainsi que le buffet Brutalist, disponible en deux dimensions, conçu par Erno Dierckx. 

Buffet Brutalist © Wewood


Nosse Ceramics, art de la table durable 

Membre du groupe Matceramica, leader dans le secteur de la céramique au Portugal, Nosse a été fondée en 2020. Engagée dans le développement durable, l’entreprise utilise le plus de matériaux recyclés possible et vise à terme le zéro déchet. En effet, les pièces sont fabriquées à partir d’un mélange d’argile recyclée et d’argile locale. Bien que certains déchets soient inévitables, ces derniers sont collectés, traités et transformés pour permettre la création de Stone, un émail unique et écologique, fait à partir de déchets 100 % recyclés. La collection Ubuntu a par ailleurs été primée à deux reprises d’un German Design Award dans la catégorie Excellent Product Design, en 2022, ainsi que d’un Good Design Award, en juin 2023. 

Collection Freya © Nosse Ceramics

Fenabel, des assises royales

Fenabel, créée en 1992, propose des chaises sur mesure destinées aux jardins d’enfants comme aux domaines de l’hôtellerie ou de la gériatrie. La marque propose plusieurs collections réalisées en collaboration avec des designers telles que Coffee de Gian Luca Tonelli & Davide Carlesi, Liv de Muka Lab ou Suzanne. Désirant s’inscrire dans le marché européen puis mondial, l’entreprise investit dans des équipements de pointe lui permettant désormais de produire 650 chaises par jour. Qu’elle s’adresse à des particuliers ou au secteur privé, la marque met un point d’honneur à s’adapter aux projets de ses clients, qu’il s’agisse des couleurs ou des tissus. Reconnue pour ses finitions et son élégance, elle a récemment conçu des sièges pour le Vatican et la présidence portugaise.

Chaise Coffee, design : Gian Luca Tonelli & Davide Carlesi © Fenabel

Et le son devient palpable avec Claraval

Claraval conjugue design, artisanat et musicalité. Par le biais d’un processus révolutionnaire, allant de l’impression 3D au coulage en barbotine en passant par l’émaillage, la marque traduit les fréquences sonores en formes. Une manière d’immortaliser la musique en œuvres voluptueuses. Uniques et expressives, ces créations allient art et technologies pour un résultat contemporain. Symbole de ce mélange des genres, la marque, enracinée dans la ville historique d’Alcobaça, s’est immiscée dans le monastère de la ville avec la chanteuse lyrique Sónia Tavares. De cette collaboration est née la collection Monastère, qui rend palpable l’acoustique si particulière du lieu dans des vases sculpturaux et complexes. 

Collection Monastère, vase Sonia © Claraval


Le changement d’état au cœur de l’objet avec Made in Situ

Le projet Bronze & Beeswax du studio Made in Situ est né d’un moment hors du temps. En 2019, le designer Noé Duchaufour-Lawrance, en quête d’inspiration au Portugal, assiste à une fonte de bronze ancestrale dans un petit village proche de Porto. Alors désireux de créer un objet dont le design évoque le changement d’état, il s’intéresse à la cire d’abeille produite dans le pays qui devient rapidement l’élément complémentaire par excellence. De cette association découle un ensemble de quinze bougeoirs. Divisés en deux familles, Lux et Flux, ils rendent respectivement hommage à la lumière et à la cire d’abeille. Conçus avec une légère inclinaison, les bougeoirs permettent à la cire de s’écouler lentement jusqu’à se solidifier pour faire bloc avec le métal. Une façon d’allier deux matières réunies dans un objet simple et complexe, sombre et lumineux. 

Bougie en Bronze et cire d'abeille © Clement-Chevelt

Hatt, pour un design évolutif et responsable

Fondée par Jorge Macedo et Marcelo Fernandes, la marque Hatt propose du mobilier dont le design est évolutif. La marque cherche en effet à créer des produits « adaptés à la nouvelle réalité, à les faire évoluer, à donner naissance à des produits fonctionnels et transgénérationnels ». Ainsi, chaque produit se distingue par une référence, une esthétique, un choix de matériau ou d’une couleur spécifique afin de proposer des pièces résultant d’un équilibre entre fonctionnalité, esthétique et ergonomie. Engagée, la marque offre des produits pensés pour durer, tant par leur design que par le choix des matériaux et des finitions associées, puisque ces derniers sont développés à partir d’études techniques sur la durabilité des matériaux et de la production. ``

Buffet Vault © Hatt

Luísa Peixoto, ambassadrice du fait-main portugais

Considérée comme l’une des premières entreprises à avoir introduit le terme de « design portugais », Luísa Peixoto imagine des pièces uniques depuis 1997. Pionnière dans le domaine du fait-main au Portugal, sa fondatrice porte depuis vingt-six ans son travail sur un respect des matières premières, en donnant une attention spécifique aux détails. Mêlant art et design, chaque pièce est faite sur mesure, à destination d’intérieurs du monde entier. Parmi ses réalisations, le paravent conçu pour un voyage du pape Benoît XVI reste l’une des plus marquantes. Elle collabore également avec divers artistes depuis 2012. 

Buffet Meandros, réalisé en collaboration avec Paulo Neves © Luisa Peixoto

Flam&Luce, et la lumière fut 

Initialement fondé en 2001 avant d’être repris par Sílvia Fernandes en 2011, l’éditeur de luminaires Flam&Luce mise sur des créations avec une identité forte. L’entreprise combine un savoir-faire du bois, du métal et du verre pour proposer des modèles uniques, faits main. Pour la collection 2023, la marque a collaboré avec douze designers : Olivier Toulouse, Mathias, Richard Pierre Duplessix, Sylvain Vialade, Florence Bourel, Didier Versavel, Pierre Tassin, Luigi Cittadini, Thierry Nénot, Paulo Henriques, Cyril Gorin et Gildas Boissier. En plus de ces collaborations signées, l’éditeur propose chaque année une collection Studio afin de répondre aux aspirations et aux désirs des clients avec lesquels la marque a pu échanger au cours de l’année. La collection Totem, présentée en 2022, propose quant à elle des luminaires personnalisables en termes de couleurs, de matières, de formes et de tailles. 

Luminaire amor © Flam&Luce

Herdmar, accessoires de la table 

Créé en 1911, Herdmar est l’un des plus grands producteurs de couverts de table au monde, aujourd’hui présent dans plus de 80 pays. L’usine, située à Caldas das Taipas, dans le nord du Portugal, est le lieu de création de ce savoir-faire perpétué depuis maintenant quatre générations. En moyenne, 30 000 pièces sont confectionnées chaque jour grâce à une équipe de 120 collaborateurs. Au-delà de leur qualité purement fonctionnelle, les couverts Herdmar sont de véritables accessoires de mode à table, par lesquels le design s’associe aux tendances actuelles pour proposer des éléments contemporains qui mêlent qualité, innovation et tradition. Parmi les dernières nouveautés : Enso, deuxième collaboration avec le designer portugais João Ferreira, est le reflet de l’équilibre, de la force et de l’élégance, tandis qu’Osier, créé par l’équipe de design interne d’Herdmar, est un hommage à l’art ancien du travail de la tige d’osier présenté sous la forme d’une adaptation des poignées Mono.

Collection Enso © Herdmar


Zagas, savoir-faire du bois

Zagas est une marque de mobilier spécialisée dans la fabrication de meubles en bois massif. Fondée par Gonzaga Barros da Silva en 1948, l’entreprise, dont l’usine est installée à Paredes, dans la région de Vilela, est aujourd’hui dirigée par Albano, Elias et Filipe Silva. En juin dernier, lors de la Portugal Home Week de Porto, et afin de célébrer ses 75 ans, l’entreprise présentait sa première collection de mobilier de chambre. Une série qui comprendra notamment des produits des gammes Oblique, Essence et Everest, et dont le textile de lit provient de la marque Lameirinho, également portugaise.

Collection Fiore © Zagas

Colunex, pour l’amour du sommeil 

Évoluant dans le domaine de la literie, Colunex est une entreprise spécialisée dans la création d’espaces de sommeil sur mesure et propose des matelas et des oreillers adaptés, mais pas que. En effet, les lits, lampes et tables de chevet sont également personnalisés pour permettre la création de la chambre « parfaite ». Chaque phase de production est méticuleusement contrôlée, dans un respect des normes de sécurité et de qualité les plus exigeantes. Ainsi, chaque lit Colunex combine technologie et design, et cela est rendu possible grâce au savoir-faire de ses artisans. Pour les matelas, différents types ont été développés, tant pour la technologie qu’ils intègrent que pour le confort final qu’ils offrent, afin de s’assurer que chaque client y trouve son sommeil. 

© Colunex
Rédigé par 
Maïa Pois et Tom Dufreix

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20/2/2025
Dolce & Gabbana, l'Italie dans toute sa splendeur

Le Grand Palais héberge jusqu'au 31 mars 200 créations de la maison italienne Dolce & Gabbana. Une mise à l'honneur maximaliste des savoir-faire italiens sur fond d'architecture.

Un voyage en Italie, de la Renaissance à aujourd'hui. C'est ce que propose l'exposition « Du cœur à la main », visible au Grand Palais. Découpé en une dizaine de salles, le parcours propose une plongée dans l'univers maximaliste et baroque de Domenico Dolce et Stefano Gabbana. Plus qu'une exposition de mode, la présentation de 200 tenues piochées dans les collections de ces neuf dernières années, est une ode au mode de vie transalpin. Par le prisme d'Alta Moda (la haute couture féminine), Alta Sartoria (l'univers sartorial masculin) ou Alta Gioielleria et Alta Orologeria (la haute joaillerie), c'est une réinterprétation de l'Italie qui est ici cousue d'or.

Influencé par Le guépard du cinéaste Luchino Visconti, le duo de styliste rend hommage aux tenues de la noblesse italienne ©Mark Blower Photography

L'Italie sous toutes les coutures

Laine, foulards, raphia, plumes, zibeline, verre ou encore précieuses, chez Dolce & Gabbana, l'habit et l’accessoire sont tout sauf passe-partout ! Excentriques, raffinées ou too-much (à moins qu'il ne s'agisse des trois à la fois), les créations de la marque italienne fondée en 1985 sont surtout hétéroclites. N’hésitant pas à piocher dans l'esthétique liturgique, mais également l'opéra, le cinéma ou les coutumes siciliennes, le duo de stylistes illustre la perméabilité entre les Arts d'hier et la mode d'aujourd'hui. Une porosité incarnée par des villes comme Venise, Capri, Portofino, Naples, Palerme, ou encore Syracuse, ayant donné leurs noms à des collections. Et ce n'est pas un hasard, car ces cités regorgent d'une chose chère aux créateurs : l'architecture. Un terme généralement utilisé pour évoquer le vêtement d'un point de vue formel – ce qui est le cas pour bon nombre de créations, dont celle en verre de Murano réalisée avec l'entreprise historique Barovier & Toso –mais qui désigne ici de manière plus pragmatique, une inspiration omniprésente. Un sweat en vison aux motifs inspirés de la mosaïque antique, des tailleurs réalisés intégralement au point de croix avec pour motifs de célèbres monuments comme le Palazzo Vecchio et la cathédrale de Florence, ou encore des corsets imprimés tout en volutes en hommage aux imposants stucs des églises italiennes. Dessinée avec une certaine forme de théâtralité, chaque création s'affiche comme un hommage à l'Italie des cartes postales, mais aussi à l'excellence du fatto a mano (« fait à la main ») issu des nombreuses collaborations de la marque.

Dans une mise en scène immaculée, la marque expose une sélection particulièrement sculpturale ©Mark Blower Photography

Une immersion dans le travail des petites mains

Conçue comme une succession d'univers imaginés par l'Agence Galuchat et produite par IMG, l'exposition initie une résonance entre le cadre et les tenues. Sur fond de grands airs épiques issus de l'opéra ou de films, la scénographie plonge le visiteur dans 10 thématiques pensées comme des micro-architectures au sein desquelles les créations ont été rassemblées de manière thématique. Reprenant tantôt les codes visuels des habits, tantôt le cadre des défilés ou celui à l'origine du dessin, le décor offre une déambulation faite de ruptures successives. Une manière d'insister sur la diversité de la marque, mais également la richesse culturelle de l'Italie. Mettant en avant des savoir-faire comme la mosaïque, la miroiterie ou encore le stuc, « Du cœur à la main » rend hommage à toutes les petites mains, et pas seulement celles de la mode. Une déambulation extravagante et festive mais surtout divinement italienne, à ne pas rater en dépit de son coût... également extravagant.

Servie par une scénographie numérique, les vêtements reprenant les chefs-d'œuvre de Botticelli, Le Titien ou encore Salai, laisse entrevoir la résonance entre architecture, créations picturales et mode ©Mark Blower Photography
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18/2/2025
La Redoute s’associe à huit designers pour le projet « Les Uniques »

Dans le cadre du projet « Les Uniques », La Redoute Intérieurs a fait appel à huit designers pour personnaliser une pièce choisie parmi les collections La Redoute, avec une seule règle : qu'il n'y en ai aucune. Une initiative qui donnera lieu à une vente aux enchères le 11 mars prochain, au sein de l’Hôtel Drouot.

Kevin Germanier, Jeanne Friot, Mathieu Tran Nguyen, Elisa Uberti, Benjamin Benmoyal, Charles de Vilmorin, Pascaline Rey et Alexandre Blanc : voici les huit créateurs sélectionnés pour participer à ce projet d’envergure lancé par La Redoute Intérieurs. Intitulé « Les Uniques », ce projet de collection capsule a un objectif simple : donner une seconde vie à des pièces de mobilier issues de la boutique Les Aubaines, située à Roubaix. L’occasion pour ces créateurs, issus de divers horizons du design, d’exposer leur singularité et leur personnalité à travers une pièce unique.

Les Uniques x Pascaline Rey © La Redoute
Les Uniques x Alexandre Blanc © La Redoute

Manifeste créatif

Au-delà du projet créatif et caritatif, ce projet soulève une question plus large sur notre rapport aux objets et à leur temporalité. En effet, certaines pièces, une fois transformées, sont méconnaissables et laissent penser qu’il est possible de réinventer le mobilier à l’infini à partir d’objets existants. Un travail de pièce unique qui porte également un message et un engagement sur l’avenir du design. Mais jusqu’où peut-on déconstruire et réécrire un design sans en effacer l’âme ? C’est justement la question que se sont posée les huit invités du projet.

Les Uniques x Kevin Germanier © La Redoute

Huit créations singulières

Connu pour son travail sur le tissage de bandes magnétiques VHS, Benjamin Benmoyal s’est emparé du fauteuil en rotin Malu pour l’habiller d’un tweed étoilé, faisant de l’assise une extension de ses explorations textiles. Alexandre Blanc, quant à lui, dont la pratique oscille entre peinture et couture, transforme la table en chêne Adelita en un tableau en trompe-l’œil, jouant sur les ombres et les transparences pour en exalter les lignes architecturales. Avec Charles de Vilmorin, la méridienne Tapim devient un écrin textile, revêtue d’un jacquard sur-mesure tissé dans la plus pure tradition lyonnaise.

Les Uniques x Benjamin Bnemoyal © La Redoute

Jeanne Friot, de son côté, impose son langage mode en sanglant un duo de chaises Sarva avec ses ceintures signature. Pour Kevin Germanier, qui s’est attaqué au luminaire Moricio, l’objet devient sculpture, saturé de perles brodées et oscillant entre artefact décoratif et œuvre précieuse, dégageant un éclat baroque. Pascaline Rey, quant à elle, opte pour une approche contemplative en intégrant au bureau Tristan une céramique évoquant une banquise suspendue, entre rêverie et fragilité du monde.

Les Uniques x Charles de Villemorin © La Redoute

Chez Mathieu Tran Nguyen, la desserte Hiba initialement métallique, disparaît presque sous les ajouts sculpturaux de bois laqué, rappelant les jeux de panneaux et de paravents. Enfin, Elisa Uberti, fidèle à son approche du design sculptural, insère une lampe en céramique directement dans la structure de la desserte Crueso, abolissant la frontière entre mobilier et œuvre d’art.

Les Uniques x Elisa Uberti © La Redoute
Les Uniques x Jeanne Friot © La Redoute

Une vente aux enchères caritative

Pour ce projet collectif multidisciplinaire, La Redoute Intérieurs exposera dans un premier temps les huit pièces du 7 au 11 mars prochain au sein d’une salle de l’Hôtel des Ventes Drouot. Puis, le mardi 11 mars à partir de 19h, une vente aux enchères exclusive aura lieue et sera retransmise en direct sur le site internet de ce dernier. Tous les bénéfices de la vente seront ensuite reversés à l’association Solfa (Solidarité Femmes Accueil), qui vient en aide aux femmes et aux enfants victimes de violences. Cette association, soutenue par La Redoute depuis de nombreuses années, renforce l’aspect solidaire de ce projet unique.

Les Uniques x Mathieu Tran Nguyen © La Redoute
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17/2/2025
Une collection en carbone dessinée par Emmanuel Gallina

Le designer français Emmanuel Gallina signe la première collection de la jeune marque de mobilier en fibre de carbone, Belull.

C'est une aventure qui débute la tête dans les nuages. « Tout a commencé lors d'un vol Bordeaux-Milan, où j'ai rencontré par hasard Stéphane Lull, le PDG d'Epsilon composite, une entreprise du Médoc spécialisée dans les tubes en fibre de carbone. » Une conversation, un échange de contact et bien des années plus tard, une proposition. « Bénédicte Lull m'a recontacté avec le projet de créer une marque de mobilier à partir de tubes en carbone ne répondant pas aux critères requis par l'industrie. Cette idée de concevoir du mobilier en s'appuyant sur le savoir-faire de l'entreprise et en valorisant des morceaux inutilisés m'a plu et j'ai dit oui ! » Entamée en 2021, cette collaboration est à l’origine de 27 pièces diversifiées, de l’étagère au miroir en passant par le banc. Un corpus à l’apparence « technique mais néanmoins chaleureux ».

La table Gustave nommée en hommage à ingénieur Gustave Eiffel, est le fruit d'une réflexion sur la manière dont rigidifier la structure en carbone, un matériau relativement flexible ©Cécile Perrinet Lhermitte

Une initiation

Véritable découverte pour le designer, le matériau est rapidement soumis à toutes sortes d'expérimentations. « Contrairement au tube en aluminium ou en acier auxquels elle peut s'apparenter, la fibre de carbone, à la fois légère et très résistante, est beaucoup moins rigide que le métal. Il a donc fallu bien maîtriser l’élasticité des tubes et des plats, puis chercher comment rigidifier les structures, avant de continuer. » Une étape de développement étalée sur plusieurs mois en amont desquels plusieurs typologies d'objets avaient été identifiées. « À ce moment-là, nous avions aussi la contrainte de réaliser des choses simples, car Bellul n'avait pas encore d'espaces de fabrication. Il a donc fallu s'organiser avec des ateliers extérieurs » raconte Emmanuel Gallina.

La table bijoux en quartz bleu joue sur le contraste de ses diamètres et la dualité des surfaces renforcées par les couleurs ©Cécile Perrinet Lhermitte

La fibre de carbone, mais pas seulement

« L'une des particularités du tube de carbone, c'est le tressage de la fibre, assez lisible en surface. » Un rendu « froid et technique » que le designer a associé à d'autres matériaux nobles comme le bois (chêne naturel et noyer) ou le marbre de Carrare. « Nous aurions pu le laisser brut, mais j'ai souhaité éviter l'approche monomatière car cela ne correspondait pas au marché de l'habitat. Il fallait donc amener de la chaleur avec un contraste qui ne soit ni froid ni agressif, mais qui puisse s'intégrer naturellement et de manière fluide avec le carbone. » Une manière de créer par ailleurs une dualité entre la zone structurelle, c'est-à-dire le piètement, et la partie décorative qu'est le plateau. Une jolie collaboration qui rime avec valorisation.

La console Kumo - qui signifie nuage en japonais - est un homme au pays du soleil levant avec lequel Epsilon Composite collabore sur de nombreux projets ©Cécile Perrinet Lhermitte
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13/2/2025
Au MAD, l'intimité s'expose

Le Musée des Arts Décoratifs propose jusqu'au 30 mars de pousser la porte de la chambre, espace d'intimité par excellence, dont l'évolution des usages traduit près de 400 ans d'histoire de la société. Une exposition tout autant indiscrète qu'intéressante.

Regarder par la serrure. Voici l'indiscrétion à laquelle la Musée des Arts Décoratifs de Paris invite ses visiteurs jusqu'à la fin du mois de mars. Dans une sorte de rétrospective dédiée à l'un des espaces les plus impénétrables de nos intérieurs, le MAD propose de porter un regard chronologique du XVIIIe siècle à nos jours. Condition sine qua non à l'indépendance et à l'émancipation pour Virginia Wolf, la chambre, à soi ou partagée, est le témoin privilégié de l'évolution sociétale de nos us et coutumes. Tout à la fois théâtre de la vie intime et décor de mises en scène à vocations sociales, elle illustre depuis toujours la porosité entre sphère publique et privée. Une fluctuation de la frontière évoquée au travers de douze thématiques.

In-situ de l'exposition "L'intime, de la chambre aux réseaux sociaux", MAD Paris © Luc Boegly

L'objet engendré par l'époque

Tantôt espace de restriction des libertés dont la femme fut la première touchée, tantôt espace d'expression avec l'arrivée progressive de la technologie, la chambre est avant tout un microcosme dont l'évolution progressive demeure très liée à la société, entraînant la création de nouveaux objets. Matérialisations de courants de pensée, tous témoignent d'une époque. L'hygiénisme du XIXe siècle voit ainsi se développer une multitude de pièces. Les baignoires intègrent la chambre à mesure que de nouveaux ustensiles de coquetterie débarquent, devenant des supports aux designs les plus en vogue. En témoignent les bourdaloues - pot de chambre féminin – dont l'usage se démocratise, et les exemplaires se déclinent plus ou moins richement. Le XXe siècle est également celui des mutations sociales rapides. La révolution sexuelle offre une nouvelle perception du désir et du plaisir intimement liés à la chambre. Un sujet que des artistes comme David Hockney ou Zanele Muholi immortalisent sur différents médiums, et sur lequel nombre de designers travailleront plus tard, notamment avec la démocratisation des sex-toys.

In-situ de l'exposition "L'intime, de la chambre aux réseaux sociaux", MAD Paris © Luc Boegly

Mais les bouleversements modernes sont également sources d'inspiration pour de jeunes esprits novateurs, futures références du design. Parmi eux, Verner Panton dont la Living tower incarne la volonté d'un repli protecteur, très vite remplacé par le besoin de communier dans les 70's. Une époque où entrent alors en scène des studios stars comme Archizoom, Memphis ou bien plus récemment, les frères Bouroullec.

In-situ de l'exposition "L'intime, de la chambre aux réseaux sociaux", MAD Paris © Luc Boegly

La technologie au pied du lit

Le poste radio, le walkman, le minitel rose, les téléphones portables ou encore la téléréalité. Depuis près d'un demi-siècle, l'intimité de la chambre à coucher se trouve bousculée par l'arrivée de supports médiatiques extérieurs. Plus petits, moins bruyants (parfois), plus complets, tous ont su convaincre leur public. Un fait auquel l'exposition dédie la fin de son parcours. Affichés en grand, les réseaux sociaux et leurs personnalités lifestyle les plus influentes comme Léna Mahfouf ou Sophie Fontanel, font désormais partie intégrante de notre intimité partagée. Un constat sur lequel s'ouvre un espace dédié à la surveillance. Un lieu d'interrogation utile après ce balayage historique rapide depuis les toiles d'Antoine Watteau et Edouard Vuillard situées à quelques mètres de là, si proches et si lointaines. Donnant la possibilité au visiteur de coucher sur le papier ses pensées, la dernière salle de l'exposition propose de renouer avec l'intimité ultime, celle que l'on entretient avec sa propre personne.

In-situ de l'exposition "L'intime, de la chambre aux réseaux sociaux", MAD Paris © Luc Boegly
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